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Enjeu des oligoéléments

Temps de lecture : 5 minutes

Enjeu des oligoéléments dans l’alimentation humaine et conséquence sur la production agricole

Dans cette publication nous allons présenter l’enjeu des oligoéléments dans l’alimentation humaine et les conséquences sur la production agricole.

En alimentation humaine, les oligoéléments sont dits essentiels quand leur carence se traduit par un trouble fonctionnel et quand son apport à dose physiologique prévient ou guérit ce trouble. Les déficits les plus courants concernent le fer, le sélénium, le zinc, le cuivre et l’iode. En France, c’est plus d’un tiers de la population adulte qui n’atteint pas les besoins nutritionnels en cuivre, zinc et iode et davantage encore pour les enfants. Les conséquences de ces carences sur la santé humaine sont multiples fonction du niveau de carence et du stade de vie des personnes. Les pistes pour améliorer le statut en oligoéléments sont :

  1. diversification de l’alimentation,
  2. fortification des aliments par ajout,
  3. supplémentation,
  4. biofortification par modification des teneurs intrinsèques des produits agricoles notamment les végétaux.

Cette dernière voie est aujourd’hui encore peu explorée, des travaux sont toutefois menés sur le zinc. Se pose toutefois une question importante : viser l’optimum pour la santé humaine est-il réellement compatible avec l’optimum agronomique de rendement des cultures ?

Les oligoéléments, un enjeu de santé humaine

Les oligoéléments essentiels pour l’Homme

Pour l’Homme, les oligoéléments essentiels sont le chrome, le fer, le fluor, le cobalt, le cuivre, la manganèse, le molybdène, le nickel, le sélénium, le vanadium, le zinc et l’étain. Parmi les déficits les plus courants, on retrouve le fer, le zinc, le cuivre, le sélénium et l’iode qui jouent pourtant des rôles fondamentaux pour notre santé.

 RôlesBesoins journaliersAliments concernésAbsorption
FerTransport et utilisation de l’oxygène   Réactions d’oxydoréduction4 gFoie, viandes, poissons et fruits de mer, légumineuses, noix, céréales, jaune d’œuf et légumes à feuilles vertes  Formes héminique et non héminique dans viandes et poissons : absoption > 25%   Forme non héminique dans végétaux : la présence de tannins, phytates et Zn dans les légumineuses réduisent l’absorption du fer, la vitamine C l’augmente  
ZincActivité de près de 300 enzymes   Stabilisation de la structure tertiaire d’hormones   Métabolisme des AGPI et des PG   Stabilisation des membranes cellulaires2 gViande, abats, fromage, légumineuses, poissons et fruits de merLa présence de tannins et phytates réduisent l’absorption du fer
Les oligoéléments : fer et zinc
 RôlesBesoins journaliersAliments concernés
CuivreRéactions d’oxydo-réduction Qualité des cartilages Minéralisation osseuse Régulation de neurotransmetteurs Fonction cardiaque Fonctions immunitaires Métabolisme du fer70 mgAbats, crustacés et mollusques et oléagineux
SéléniumSélénoprotéines Métabolisme des hormones thyroïdiennes Défenses antioxydantes14 mgCertains poissons et fruits de mer, viande, œufs et oléagineux (particulièrement la noix du Brésil)
Les oligoéléments : cuivre et sélénium

Au niveau mondial, près de deux milliards de personnes présentent une carence en Fer et en Iode. En France, l’étude Nutrinet Saté montre une forte prévalence d’inadéquation d’apports en Fer chez la femme (non observée chez l’homme quelque soit le régime alimentaire) en particulier pour les femmes de moins de 55 ans omnivores. A l’inverse, les femmes végétariennes ou végétaliennes sont davantage carencées en zinc.

Les principales causes de carence en oligoéléments

Les principales causes de carence sont :

  1. des apports inadéquats,
  2. une biodisponibilité réduite (vieillissement, interactions nutritionnelles/médicamenteuses…),
  3. une augmentation des besoins (femmes enceintes, fumeurs…),
  4. des pathologies (cancers, intestinales, inflammatoires…).

Les conséquences sont multiples et le coût humain très élevé.

Les voies d’amélioration du statut en oligoéléments

Pour améliorer le staut en oligoéléments de la population, quatre voies sont explorées par l’OMS :

  • Diversification des régimes alimentaires
  • Fortification des aliments consistant à ajouter des oligoéléments aux aliments : biscuits fortifés en fer (Inde), enrichissement de la farine en fer, zinc…, sauce soja enrichi en Fer (Chine)…
  • Supplémentation en oligoéléments notamment en zinc (Asie centrale et méridionale, Afrique, Amérique du Sud et Caraïbes)
  • Biofortification en mangeant des produits dont la concentration en oligoéléments a été augmentée

Teneurs en oligoéléments dans les plantes : conséquences pour la production agricole

Rôle et concentrations dans les plantes des oligoéléments

Les oligoéléments sont absorbés à des doses généralement infimes par les plantes. Pour lesquelles, ils constituent des nutriments essentiels pour leur croissance.

Ils jouent une diversité de rôles qu’ils tirent de leurs capacités à assurer le transport d’électrons, à être co-activateurs d’enzymes, voire leurs constituants spécifiques. Ces rôles touchent aux processus de la photosynthèse et de la respiration, à la neutralisation des radicaux libres, au transport de sucre, à la réduction des nitrates en molécules précurseurs des acides aminés, à l’assimilation de l’azote atmosphérique…

Rôle et concentrations dans les plantes des oligoéléments
Rôle et concentrations dans les plantes des oligoéléments

Il existe une variabilité interspécifique des concentrations en oligoéléments, par exemple le brocoli étant huit fois plus riche en Fer que le riz et 2,7 fois plus riche que l’épinard. A cela s’ajoutent, pour une espèce donnée, des facteurs de variation qui rendent très complexes la prédiction de la qualité des récoltes en terme de concentrations en oligoéléments.

Concentrations dans les plantes des oligoéléments

Une étude a été menée par Jordan-Meillet et al en 2021 :

  • sur 3 cultures : orge, avoine et blé
  • pour 4 oligoéléments : cuivre, fer, manganèse et zinc
  • dans 2 types de sols : sableux ou limonoargileux
  • avec des plages de pH allant de 4,5 à 7.
Résultats de l'étude a été menée par Jordan-Meillet et al en 2021 
Résultats de l’étude a été menée par Jordan-Meillet et al en 2021 

Concernant le fer, seul un effet espèce a été mis en évidence. Pour le cuivre, c’est l’effet sol qui prédomine, pour le manganèse, l’effet pH et pour le zinc, il n’y a pas de facteur prédominant.

Il existe également un effet variétal. Une analyse réalisée sur les variétés de céréales courte paille a montré qu’en parallèle de l’augmentation des rendements permise par la sélection génétique, on a observé une diminution des teneurs en zinc, cuivre, manganèse et fer dans les grains. C’est très certainement d’abord un effet dilution mais également peut être une modification de la dynamique de redistribution de ces éléments dans la plante.

Le principe de biofortification un enjeu pour les oligoéléments

Dans tous les cas, entre les années 1970 et 2000, on observe une réduction des absorptions moyennes journalières par personne pour le manganèse, le zinc, le cruivre et le fer pouvant aller jusqu’à 30 % entrainant des risques de malnutrition (Ekholmet et al, 2007).

Absorptions moyennes journalières d'oligo-éléments par personne (Ekholmet et al, 2007)
Absorptions moyennes journalières d’oligo-éléments par personne
(Ekholmet et al, 2007)

Le principe de biofortification vise à inverser cette tendance. Il s’agit d’augmenter la concentration en oligoéléments dans les parties récoltées et consommées sans affecter le rendement c’est-à-dire en trouvant l’optimum santé/rendement.

Des travaux (Cakmak et Kutman, 2018) ont été menés sur le zinc sur trois céréales : blé, riz et maïs. Différents modalités d’apports de zinc ont été réalisées : au sol, foliaire et sol+foliaire.

Travaux sur le principe de biofortification (Cakmak et Kutman, 2018)
Travaux sur le principe de biofortification
(Cakmak et Kutman, 2018)

Il en ressort que les applications folaires sont plus efficaces mais que les réponses sont espèces dépendantes (très bonne réponse du blé et pas d’effet sur maïs). L’efficacité est d’autant meilleure que l’application est tardive (remplissage) et le coût économique est faible.

Ces travaux offrent des perspectives intéressantes de biofortification pour les populations déficientes en Zinc. Toutefois, il faudra bien prendre en compte les synergies/antagonismes avec les autres oligoéléments.

Sources de la publication sur l’enjeu des oligoéléments

CAKMAK I, et KUMTAM U.B., 2018. Agronomic biofortification of cereals with zinc : a review. Europen journal of soil science, 69. 172-180 doi: 10.1111/ejss.12437

FEILLET-COUDRAY C., 2022. Rôle des oligoéléments en alimentation humaine. Journée technique COMIFER «Oligoéléments et contaminants » 12 avril 2022

JORDAN-MEILLE L, 2022. Teneurs en oligoéléments dans les tissus végétaux : conséquences pour la production agricole et l’alimentation humaine. Journée technique COMIFER «Oligoéléments et contaminants » 12 avril 2022

Retrouvez toutes nos publications en lien avec les oligoéments sur notre site intérnet.

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