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Rhizodéposition, plante, sol

Temps de lecture : 6 minutes

Rhizodéposition : un moyen d’échanges entre la plante et le sol

Découvrez ce qu’est la rhizodéposition et quels sont les facteurs qui la modulent.

Date de publication : 7 février 2024

La rhizodéposition au sens large se définit comme « la libération de toutes sortes de composés par les racines d’une plante vivante, y compris les ions et les composés volatiles ». En moyenne, 17 % du carbone fixé par la plante sont rhizodéposés dans le sol. Mais on peut monter à 50 % chez les plantes prairiales. La rhizodéposition de l’azote est quant à elle estimée entre 4 et 71 % du N total assimilé par la plante. Avec une médiane de 16 % chez les Fabacées et 14 % chez les céréales. L’étude de la rhizodéposition montre toute la complexité de la compréhension de ce processus et des facteurs qui peuvent la moduler avec en premier lieu l’espèce.

L’exsudation dans la rhizosphère est fortement liée :

  • à la photosynthèse,
  • à l’allocation de ressources dans les différents compartiments
  • et aux traits morphologiques notamment racinaires des plantes.

Par exemple, les racines les plus fines et longues semblent exsuder plus de carbone que les racines présentant des diamètres plus élevés. Enfin, les espèces de prairie présentent une plus grande allocation de C au compartiment souterrain (33 % du C total net fixé) par rapport aux espèces de grandes cultures (21 % du C total net fixé). Ce qui peut expliquer une rhizodéposition plus importante.

La rhizodéposition de l’azote et du carbone par les plantes est reconnue comme l’un des facteurs du déterminisme des communautés microbiennes du sol. Ces microorganismes, acteurs essentiels des processus et cycles biogéochimiques dans le sol, vont en effet transformer ces rhizodépôts. Et moduler la disponibilité des nutriments dans le sol via leurs activités enzymatiques. La meilleure compréhension de ce déterminisme est une voie de recherche importante dans la mise au point de systèmes de production agroécologiques.

Processus de rhizodéposition du carbone et de l’azote

La rhizosphère, lieu de la rhizodéposition

Les systèmes racinaires des plantes jouent un rôle essentiel dans la croissance et la nutrition des plantes. Via leur fonction de prélèvement de minéraux à partir du sol. En plus de leur capacité à absorber des minéraux et de stocker des composés chimiques biologiquement actifs, les racines libèrent également différents types de composés dans la rhizosphère.

La rhizosphère se définit comme le volume de sol sous l’influence et en contact direct avec les racines d’une plante en croissance. Elle constitue ainsi une zone d’interaction entre la plante et les microorganismes du sol. La rhizosphère est une zone de sol particulièrement importante. C’est un hotspot où l’activité microbienne est de 2 à 20 fois supérieure à celle d’un sol non influencé par l’activité racinaire.

Définition de la rhizodéposition

La rhizodéposition se définit d’abord comme l’émission de carbone (C) organique par les racines. Cela inclut l’exsudation, les lysats cellulaires, les débris racinaires et les cellules de bordure. Mais les racines libèrent en plus du C des composés minéraux et en particulier des composés azotés. Ainsi, la rhizodéposition au sens large se définit comme « la libération de toutes sortes de composés par les racines d’une plante vivante, y compris les ions et les composés volatiles ».

On peut subdiviser ce processus en deux parties :

  • Les composés provenant de racines vivantes (tissus et cellules). On a notamment l’exsudation racinaire avec sécrétion d’ions, d’enzymes, de mucilage et une large gamme de métabolites primaires et secondaires.
  • Les composés provenant des résidus des tissus racinaires. On retrouve des fragments racinaires avec notamment la sénescence des tissus racinaires et des cellules de bordure.

Rhizodéposition du carbone

Par fixation et transformation du CO2 atmosphérique en composés organiques, les plantes contribuent à l’augmentation du stock de C organique du sol. Cet apport résulte de la décomposition des résidus de tissus végétaux et de la rhizodéposition. En moyenne, 17 % du C fixé par la plante sont rhizodéposés dans le sol . Mais on peut monter à 50 % chez les plantes prairiales.

Le C issu de l’exsudation serait 10 à 100 fois plus important par rapport au C provenant des cellules bordantes et des mucilages. Les composés solubles exsudés (majoritairement des sucres, des acides organiques et des acides aminés) contribueraient quant à eux de 1 à 10 % au flux total de C. Cette source de C est rapidement consommée par les microorganismes et environ un tiers du C rhizodéposé contribue à la biomasse microbienne.

Rhizodéposition de l’azote

La rhizodéposition de l’azote suit les mêmes voies que le C. Cela inclue ainsi la senescence racinaire et l’exsudation de composés solubles. L’exsudation de composés N solubles est constituée de 6 à 31 % d’éléments comme le NO3, le NH4+ et les acides aminés.

La quantité d’N rhizodéposé et la composition des exsudats en N varient également en fonction des espèces. Ainsi, les espèces de Fabacées présentent des exsudats racinaires plus riches en NH4+ et en acides aminés par rapport aux exsudats des autres espèces.

Alors que les flux de C se font presque exclusivement de la plante vers le sol, les échanges d’azote entre le sol et les plantes se font dans les deux sens. Mais surtout du sol vers la plante via l’absorption de l’N. La rhizodéposition de l’N est estimée entre 4 et 71 % du N total assimilé par la plante. Avec une médiane de 16 % chez les Fabacées et 14 % chez les céréales.

Facteurs de variation de la rhizodéposition

Facteurs de variation de la rhizodéposition

Effets des facteurs biotiques sur la rhizodéposition

Différents facteurs et en premier lieu l’espèce influence la rhizodéposition. De nombreux travaux ont étudié l’effet du stade de développement sur la rhizodéposition. Mais les résultats obtenus sont contradictoires. Ainsi, pour certains, plus la plante est âgée, moins il y aurait de carbone alloué au compartiment souterrain. D’autres études montrent une augmentation de la rhizodéposition avec l’âge. Dans tous les cas, la composante d’exsudation est particulièrement importante chez les plantes jeunes.

Effets des facteurs abiotiques sur la rhizodéposition

La disponibilité en nutriments impacte également la rhizodéposition. Des études démontrent une augmentation du C issu de la rhizodéposition avec une augmentation de la fertilisation N. Cette augmentation serait liée à une plus forte production de biomasse racinaire et à une plus forte exsudation.

La concentration en CO2 peut également impacter la rhizodéposition. En effet, certaines études montrent une augmentation de la rhizodéposition du C et de l’N pour des plantes soumises à des concentrations élevées de CO2. D’autres facteurs importants entrent également en jeu, notamment la texture du sol, le pH, la salinité et l’humidité.

Relations entre traits morphologiques et rhizodéposition chez les fabacées

Des différences de rhizodéposition de carbone entre espèces de fabacées

Des différences de rhizodéposition de carbone entre espèces de fabacées

Une étude a montré que la quantité de 13C assimilée par le trèfle blanc est supérieure à celle assimilée par la féverole. Mais elle ne diffère pas significativement du résultat du pois et du trèfle incarnat (Figure 3A). On observe la même chose dans le sol. Concernant la répartition du 13C entre les différents compartiments (Figure 3B), la féverole présente une répartition plus équilibrée entre les tissus végétaux et le sol avec une proportion plus importante de 13C dans les racines que les autres espèces. Enfin, pour s’affranchir du poids de la photosynthèse sur l’exsudation et se concentrer sur les relations possibles entre les traits racinaires et l’exsudation, on exprime l’exsudation du C en fonction du C total fixé (exsudation spécifique (Figure 3 C)). Le trèfle blanc a exsudé plus de C récent par unité de C fixé comparativement aux deux espèces protéagineuses.

Une rhizodéposition plus forte pour les fabacées prairiales

La corrélation positive entre la longueur spécifique racinaire et l’exsudation spécifique, ainsi que la corrélation négative entre le diamètre et cette exsudation, expliquent que les plantes qui forment des racines longues et fines, tels que les deux trèfles, sont celles qui exsudent le plus. Les espèces de prairie présentent une plus grande allocation de C au compartiment souterrain (33 % du C total net fixé) par rapport aux espèces de grandes cultures (21 % du C total net fixé), ce qui peut expliquer une rhizodéposition plus importante.

Une rhizodéposition plus forte pour les fabacées prairiales

Une relation linéaire entre rhizodéposition de C et de N

Une relation linéaire entre rhizodéposition de C et de N

Les plantes présentant une forte capacité de rhizodéposition carbonée ont également une forte capacité de rhizodéposition azotée (illustration ci dessus).

Pour en savoir plus sur les interactions entre plantes et sol, n’hésitez pas à consulter nos publications dans la rubrique Gestion des sols.

Source :

KANTE M., 2022. Rhizodéposition du carbone et de l’azote chez quatre espèces de Fabacées, conséquences sur la structure et l’activité du microbiote du sol.

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