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Albédo des prairies et changement climatique

Temps de lecture : 5 minutes

Albédo des prairies, un levier supplémentaire dans l’atténuation du changement climatique

Albédo des prairies est un levier supplémentaire dans l’atténuation du changement climatique, découvrez notre article.

Date de publication : 20 juin 2023

L’albédo se définit comme la quantité de rayonnement solaire réfléchie par une surface. Plus l’albédo est élevé, plus l’énergie repart vers l’espace et moins il reste d’énergie pour réchauffer l’atmosphère. En cela, le GIEC considère l’albédo comme un levier non négligeable d’atténuation du changement climatique.

Pendant trois ans, l’Institut de l’Elevage et le CESBIO (centre d’études spatiales de la biosphère (INRAE, CNRS, CNES…) ont mené un projet visant à mieux caractériser la variabilité spatio-temporelle de l’albédo des prairies en France et à identifier des leviers d’augmentation de l’albédo. Il apparait que les prairies ont un effet albédo intéressant dans la limitation du changement climatique. Mais pour avoir un effet maximal, il faut maximiser la couverture des sols et éviter les sols nus, et chercher des compromis entre pratiques. Il s’agit notamment éviter le surpâturage en réduisant le chargement et/ou en augmentant la hauteur d’herbe en sorti des animaux.

Dans tous les cas, la mobilisation de ce levier albédo doit se faire en cohérence avec les pratiques de stockage de carbone/réduction des émissions de GES.

Albédo et changement climatique

L’albédo, un paramètre clé de la machinerie climatique

L’albédo se défini comme le rapport entre le rayonnement global réfléchi par une surface et le rayonnement global incident. Il se situe entre 0 (absorption complète) et 1 (réflexion complète). Plus une surface est réfléchissante, plus son albédo est élevé.

L’augmentation de l’albédo a pour effet de renvoyer plus d’énergie solaire vers l’espace , ce qui signifie moins d’énergie absorbée par la surface et donc une baisse de température. Ce processus à l’échelle mondiale a un effet suffisamment significatif pour compenser en partie les émissions de GES. L’albédo se classe dans la catégories des effets biophysiques sur le climat (comme l’évaporation, la transpiration des plantes, le rayonnement infrarouge) tandis que les composantes des bilans de GES et de stockage du carbone relèvent des effets biogéochimiques (photosynthèse, respiration des plantes et du sol). Favoriser la hausse de l’albédo, c’est renvoyer davantage de rayonnement vers l’espace. On parle alors de forçage radiatif négatif.

Bilan radiatif terrestre

Effet de l’occupation des sols sur l’albédo de surface

Les valeurs d’albédo dépendent du type de surface et de ses propriétés optiques. L’albédo du sol est affecté par les irrégularités de surface, son humidité (qui réduit l’albédo), sa couleur et certaines pratiques comme l’application de biochar. L’albédo de la végétation dépend des espèces cultivées mais aussi des variétés au sein d’une même espèce et il connait des variations intra et interannuelles. L’âge moyen du peuplement, la hauteur des plantes, la biomasse végétale et les compositions des espèces végétales conditionnement l’albédo de surface.

Pour les surfaces agricoles (schéma ci-dessous), les prairies ont un albédo moyen supérieur aux autres couverts. Il est plus faible pour les grandes cultures qui laissent le sol apparent plus longtemps.

Les prairies ont un albédo moyen supérieur aux autres couverts

Une étude menée en Bretagne a montré que l’évolution du forçage radiatif (courbe en bleu) est étroitement liée à l’occupation des sols. Avant 1955, la Bretagne présentait beaucoup de surfaces cultivées. De 1955 à 1980, on observe une augmentation des surfaces en herbe allant de paire avec une augmentation de l’albédo et une réduction du forçage radiatif . Puis avec la régression des surfaces en herbe, le forçage radiatif réaugmente.

L’évolution du forçage radiatif est étroitement liée à l’occupation des sols

Principaux enseignements du projet Albédo prairies

Le projet Albédo prairies avait deux objectifs opérationnels :

  1. mieux caractériser la variabilité spatio-temporelle de l’albédo des prairies en France
  2. identifier et quantifier des leviers d’augmentation de cet albédo.

Depuis 2020, l’albédo de prairies permanentes ou temporaires a ainsi été mesuré en continu dans sept stations expérimentales ayant une gestion des prairies et des pédoclimats contrastés.

Un nouveau réseau de mesures d'albédo dédié à la priaire

Evolution saisonnière de l’albédo d’une prairie

Pour cinq des sept sites expérimentaux (le Rheu, Derval, Thorigné, Pradel et Mourier), les dynamiques d’albédo présentent des similitudes, avec une augmentation entre la fin d’été et l’hiver avec une plus forte variabilité inter-journalière en hiver. L’albédo moyen journalier diminue ensuite au printemps jusqu’en été. Ainsi, l’effet albédo est quatre à cinq fois plus important en été par rapport à l’hiver.

Pour l’ensemble des sites, la variabilité inter-journalière d’albédo est plus élevée sur la période automne/hiver que sur la période printemps/été. En période hivernale, les températures et aussi l’humidité relative influencent les dynamiques d’albédo notamment via la formation de givre. La neige exacerbe cette augmentation. Par ailleurs, la pluie impacte d’autant plus l’albédo des prairies quand celles-ci sont dégradées et présentent du sol nu.

Des dynamiques d’albédo modifiées par les pratiques de gestion des prairies

Le pâturage a un effet variable sur l’albédo de surface. En moyenne, sur 37 évènements de pâturage étudiés, une baisse de 4 % a été observée durant 15 jours (plus ou moins neuf jours). Toutefois, l’effet du pâturage sur l’albédo est intimement lié au chargement.

l’effet du pâturage sur l’albédo est intimement lié au chargement

Ainsi, plus on a un chargement élevé, plus on enlève de l’herbe et plus l’albédo baisse et longtemps (temps de repousse de l’herbe plus long).

Le tableau ci dessous montre l’effet moyen des pratiques mesuré lors du projet.

La fauche semble avoir un effet plus important sur la dynamique de l’albédo que le pâturage

La fauche semble avoir un effet plus important sur la dynamique de l’albédo que le pâturage, probablement du fait de l’enlèvement rapide d’une grande quantité d’herbe en cas de fauche.

Importance de l’albédo par rapport aux GES et stockage de carbone

L’utilisation d’une méthode de conversion du forçage en équivalent CO2/ha/an a permis de comparer le forçage radiatif par rapport aux bilans de carbone ou de GES

Une comparaison entre quatre systèmes intégrant une proportion d’herbe de plus en plus importante a mis en évidence que :

  • Les systèmes herbagers ont une valeur d’albédo plus importante que les systèmes ayant le plus de cultures
  • Les systèmes herbagers ont un niveau d’albédo élevé mais qui baisse au printemps et en été.
  • Les systèmes avec uniquement des cultures ont un maximum d’albédo au milieu du printemps et plus faible en automne et hiver.

Le tableau ci-dessous montre les résultats en équivalent CO2.

les résultats en équivalent CO2

Le passage d’un système 100 % culture (0 % herbe) à 100 % herbe est équivalent à -1 439 kg eqCO2/ha/an. Ainsi, dans une ferme d’élevage, ajouter + 10 % d’herbe à l’assolement équivaut à une réduction de 143,9 kg eqCO2/ha/an.

La principale piste d’accroissement d’albédo en élevage est donc de limiter la part de sol visible :

  • En préservant la couverture du sol par la prairie (période, intensité de pâturage selon la poussse de l’herbe)
  • Par un accroissement des couverts

Dans tous les cas, il s’agit de combiner les pratiques pour cumuler les effets albédo

combiner les pratiques pour cumuler les effets albédo

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter cet article sur l’effet albédo.

Source pour rédiger l’article : Albédo des prairies et changement climatique

MISCHLER P., et al, 2022. L’albédo, un levier d’atténuation du changement climatique méconnu : quel potentiel d’atténuation pour les prairies ? Fourrages 251, 1-16

Séminaire de clôture du projet Albédo prairies, 2023.

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