Logo cerfrance

Immeuble Magellan
30-32 rue du Quadrant
14 123 FLEURY-SUR-ORNE

Augmentation de la teneur en protéines du colza

Temps de lecture : 6 minutes

Leviers pour augmenter la teneur en protéines du colza

Découvrez quels sont les leviers aujourd’hui disponibles pour augmenter la teneur en protéines du colza sans trop dégrader la teneur en huile.

La protéine du colza est aujourd’hui déjà valorisée, notamment au travers du tourteau utilisé en alimentation animale. Toutefois, des signaux faibles des marchés autour de la transition alimentaire et de la recherche de relocalisation de la production végétale destinée à l’alimentation animale semblent montrer qu’il pourrait exister de nouvelles opportunités. Ainsi, de nouveaux débouchés se profilent : utilisation du colza pour les monogastriques ou encore consommation de protéines végétales en alimentation humaine.

Mais ces nouveaux débouchés nécessitent une teneur en protéines de 22 à 26 %. Or, la moyenne française tourne autour de 19 à 21 % en fonction des années même si des teneurs plus élevées sont ponctuellement observées. Augmenter la valeur de la production annuelle française de 1 à 2 % sans diminuer le rendement aurait donc mécaniquement un impact de +5 à +10 % sur la souveraineté protéique sur une production nationale majeure comme le colza, dont les surfaces oscillent entre 900 000 et 1,1 million d’hectares annuels.

Mais c’est un véritable challenge pour la filière. En effet, il y a une corrélation négative entre teneur en protéines et teneur en huile. Les projets IN PETTO 1 et 2 pilotés par Terres Inovia ont étudié différentes pistes. Il en ressort que même si une augmentation de la dose d’azote permet une teneur en protéines plus élevée, la dose nécessaire n’est pas acceptable d’un point de vue économique et environnemental. En jouant plutôt sur les dates d’apport et la répartition de la dose entre apports, la teneur en protéines augmente mais la baisse en huile reste significative. Le fractionnement des apports de soufre n’impacte pas quant à lui la teneur en protéines. La première piste reste donc la recherche de nouvelles génétiques combinant meilleure teneur en protéines et meilleure teneur en huile.

Une corrélation négative entre teneur en protéines et teneur en huile

Depuis ses débuts, la sélection variétal du colza d’hiver vise à obtenir des teneurs en huile toujours plus élevées. Cependant, l’accumulation d’huile dans la graine est antagoniste à l’accumulation de protéines. Ainsi, plus la teneur en huile est élevée, plus la teneur en protéines est faible (graphique ci-dessous).

Cela suggère que le remplissage des grains est très contraint. Ainsi, l’accumulation de l’huile, d’une part, et des protéines, d’autre part, est soumise à une forte régulation. Cette régulation serait réalisée en partie par les mêmes gènes pour ces deux composantes. Mais les mécanismes génétiques qui les sous-tendent restent mal connus.

Différentes études menées sur le génome du colza ont montré que plusieurs des principales régions génomiques à effet quantitatif (QTL1) contrôlant l’accumulation de ces deux fractions sont localisées au même endroit dans le génome. Cela pencherait pour une régulation commune.

Le choix variétal comme premier levier pour améliorer la teneur en protéines

Terres inovia a mis en place un réseau de 10 sites en 2019 et 2020. Ce réseau a évalué une dizaine de variétés en comparaison d’une variété témoin, DK Exstorm. Ces variétés avaient été préalablement sélectionnées pour leur teneur en protéines plus élevée que la moyenne.

Les résultats obtenus (graphique ci-dessus) montrent que la teneur en protéines est très variable selon les conditions pédoclimatiques, malgré un pool de variétés testées identique entre les sites d’essais : entre 18,7 et 22,9 %, avec une moyenne de 20,9 %. Néanmoins, deux variétés, ES Cesario et RAGT2, présentent des teneurs en protéines significativement plus élevées (+1 %) que celle du témoin DK Exstorm (courbe du haut). ES Amadeo arrive en troisième position, avec un bonus de +0,8 % (mais non significatif).

De plus, alors qu’on pouvait s’attendre à voir ces trois variétés en queue de peloton concernant la teneur en huile, ES Amadeo obtient un bonus de +0,5 % par rapport à DK Exstorm (courbe du bas). Elle se classe même dans le top 3 des variétés testées. Cette variété semble donc un bon compromis.

Demain, la solution viendra de la sélection variétale. En effet, une variabilité génétique existe sur le caractère protéique du colza. Ainsi, à travers la sélection, il est possible d’améliorer significativement la teneur en protéines de la graine. Des travaux sont déjà en cours pour développer des profils variétaux de colza d’hiver high pro. Leur objectif est d’améliorer de façon significative la teneur en protéines et de réduire la teneur en fibre de la graine. Ce profil permettra une meilleure valorisation du tourteau à échéance 4 à 7 ans.

La fertilisation comme second levier pour augmenter la teneur en protéines

Une augmentation de la dose totale à apporter trop importante

Les projets IN PETTO ont démontré un effet positif des doses croissantes d’azote sur la teneur en protéines.

Toutefois, pour gagner 1 point de protéines, il faut apporter 100 kg de N/ha par rapport à la dose optimale calculée avec la réglette azote. Cela pose la question du risque de perte d’azote dans l’environnement et de la rentabilité économique d’une telle pratique.

Les essais ont également montré que la forme d’azote (ammonitrate ou urée) n’avait pas d’effet significatif sur la teneur en protéines.

Des effets marqués du fractionnement de la fertilisation azotée sur la teneur en protéines et en huile

Les projets ont permis de tester deux approches  :

  • Le retard du 2ème voire du 3ème apport d’azote au printemps en F1 et G1
  • Le report de 40 uN du 2ème vers le 3ème apport

Dans les deux cas, les essais ont montré qu’il n’y avait pas d’impact sur le rendement du colza. (graphique gauche ci-dessous). Le retard du 2ème et du 3ème apport permet de gagner 1,2 % de teneur en protéines (graphique droit). En revanche, cela entraine une baisse de teneur en huile de 0,8 %. Le couplage avec un report d’azote de 40 UN du 2ème vers le 3ème apport vient renforcer ces effets : 1,7 % de protéines en plus mais 1,1 % de teneur en huile en moins.

Ils ont également étudié les effets de ce fractionnement sur la qualité protéique. La qualité protéique se mesure par le rapport napine/cruciférine qui caractérise la richesse en acides aminés d’intérêt. En effet, les napines sont des protéines plus riches en acides aminés soufrés (cystéines) et plus riches en lysine. Ainsi, plus le ratio napine/cruciférine est élevé, plus la qualité protéique est bonne.

Les résultats ont montré d’une part, un effet site d’expérimentation très important (graphique ci-dessous) et, d’autre part, que l’augmentation de la teneur en protéines n’était pas forcément en lien avec une amélioration de la qualité protéique. 

Pas d’effet du fractionnement des apports de soufre sur la teneur en protéines

Le fractionnement des apports de soufre ne permet pas d’augmenter la teneur en protéines des graines (graphique ci-dessous).

L’ouverture de nouveaux débouchés pour le colza représente toujours une opportunité qu’il faut considérer. Dans le cas présent, l’agriculteur peut facilement mettre en oeuvre les différents leviers testés. Mais l’effet est limité. De plus, l’impact économique de ces leviers reste à chiffrer. Si la différence de coût de production est significative, il sera nécessaire que la filière se positionne pour en répartir le coût sur ses différents maillons.

La balance entre les deux fractions huile-protéines et leur valorisation sont donc à bien considérer par la filière au regard des demandes du marché et des enjeux de souveraineté alimentaire. Ce dilemme pourrait certainement se résoudre de lui-même si les nouvelles variétés de colza high pro sont commercialisées prochainement.

Pour s’informer sur le lien entre oléoprotéagineux et autonomie protéique des élevages, vous pouvez consulter l’article : https://normandiemaine.cerfrance.fr/arad2/oleoproteagineux-et-autonomie-proteique/

Source

Le Gall Céline, 2023. Comment augmenter la teneur en protéines du colza ? Présentation du projet IN PETTO. Webinaire Terres Inovia du 05 octobre 2023. https://www.youtube.com/watch?v=9jHOcJ3ovHE

Partagez sur les réseaux

Dernières publications

Plantes, sol, eau et climat

Temps de lecture : 6 minutesTravailler avec les plantes, le sol et l’eau pour refroidir le climat Découvrez l’importance des plantes et du sol dans le cycle de l’eau et la régulation du climat. La destruction continue des forêts, la détérioration des sols, la perte subséquente du stockage de l‘eau dans les sols et la

Lire la suite »

Agenda des évènements

There is no Event