Observatoire grands troupeaux laitiers 2020-2021
Les grands troupeaux laitiers sont toujours plus présents et se concentrent toujours. Avec une conjoncture morose, les résultats économiques et financiers sont en baisse. Les coûts de production continuent de progresser alors que le prix du lait chute sur la même période. La maitrise du coût alimentaire et des frais de mécanisation reste une des clés de la rentabilité : 70 000 € de revenu disponible d’écart entre les quartiles !
Les grands troupeaux laitiers toujours plus présents
Sur la campagne 2020-2021, les exploitations laitières de Normandie – Mayenne – Sarthe ont produit en moyenne596 000 litres, soit près de 30 000 litres de plus que l’an passé par exploitation, malgré la conjoncture économique peu favorable. La région Normandie serait une des seules régions, avec la Bretagne, à être encore dans cette dynamique de production sur 2021.
Les grands troupeaux laitiers se situent essentiellement sur un arc ouest du territoire
Cette tendance est en lien avec la réorganisation du paysage laitier. Il y a une diminution du nombre d’exploitations laitières et une concentration de la production au sein des exploitations, selon les dynamiques de territoires.
La part des élevages laitiers produisant plus de 500 000 litres augmente toujours
Ainsi dorénavant, plus de 55 % des exploitations laitières du territoire Normandie – Mayenne – Sarthe produisent plus de 500 000 litres. Et plus de 10 % valorisent plus d’un million de litres de lait.
Méthode
Les grands troupeaux laitiers correspondent ici aux exploitations laitières ayant produit plus de 600 000 litres de lait, sur les clôtures de juillet 2020 à juin 2021. L’analyse porte sur les exploitations disposant d’une marge brute sur l’atelier laitier et qui sont spécialisées dans la production laitière. C’est à dire que le produit lait représente plus de la moitié du produit total. Outre les données générales des grands troupeaux, les références portent sur trois groupes de production laitière par exploitation :
- 600 000 à 800 000 L,
- 800 000 à 1 000 000 L
- et 1 000 000 à 1 400 000 L.
En tendance, la main d’œuvre salariée continue d’augmenter
La production laitière des grands troupeaux spécialisés est de 960 000 litres en moyenne, soit + 30 000 litres par rapport à l’an passé, portée par une conjoncture laitière encore favorable.
Toutefois, la productivité reste stable à 350 000 litres par UTH, la main d’œuvre salariée ayant progressé.
Cette hausse s’accompagne d’une nouvelle intensification de la production. Il y a une augmentation de la production par vache atteignant 8 800 litres en moyenne.
Une marge brute par 1 000 litres : peu d’écarts entre les groupes
Sur la campagne, le prix du lait est en moyenne de 367 € / 1 000 litres. Il est légèrement en retrait par rapport à la campagne précédente.
Il n’y a aucun écart sur le prix de vente entre les différents groupes. De même, le coût alimentaire de 148 € / 1 000 litres ne fait apparaitre aucun écart entre les groupes. Les écarts sont significatifs entre les moins bons et les meilleurs.
La marge aux 1 000 litres est comparable entre les 3 groupes. Toutefois, ramenée à la vache ou par hectare de surface fourragère, plus la référence est importante, meilleure est la marge avec l’intensification du système.
Par rapport à l’année précédente, les marges sont globalement en recul. Il y a le cumul de :
- l’augmentation du coût alimentaire (notamment des coûts fourragers en hausse)
- et la baisse 3 à 4 € / 1 000 litres sur le prix du lait.
La situation économique et financière en berne
La baisse des produits avec une récole 2020 médiocre, un prix du lait en baisse, une hausse des charges globale impactent le résultat courant de 15 000 €
La hausse des charges d’aliments, des frais de mécanisation et des charges de personnel se cumulent avec :
- une récolte 2020 médiocre (rendement et prix),
- un prix du lait en recul.
Les résultats économiques des exploitations sont en retrait avec une valeur ajoutée par UTH moyenne de 65 000 € et un EBE de 146 000 €.
L’EBE ne permet pas de couvrir cette année les annuités et prélèvements privés en moyenne. Ainsi le revenu disponible chute de 6 000 € / UTAF pour atteindre 25 700 €. La capacité d’autofinancement (CAF) est négative de 9 000 € (tous les groupes sont concernés). Il manque 10 € / 1 000 litres en moyenne pour atteindre une CAF à l’équilibre. Il y a plus de différences au regard des quartiles supérieurs avec un revenu disponible par UTAF moyen de 40 000 € (contre 25 000 € en moyenne). La rentabilité progresse avec la production liée à une meilleure productivité et des économies d’échelle. Toutefois, les économies d’échelle doivent être appréhendées avec prudence.
Les charges de structure représentent ¼ du produit quel que soit le groupe. Les économies d’échelle doivent être appréhendées avec prudence
Les charges de structures progressent à nouveau de 15 000 € en moyenne par exploitation (15 € / 1 000 litres). C’est le cas notamment sur les frais de mécanisation et installations (robot) et la main d’œuvre. Elles sont de 230 000 €, soit 1 580 € /ha ou 245 €/1000 litres en moyenne. Il y a une répartition des charges en proportion du produit équivalente quel que soit le groupe.
Toutefois, ramené à l’hectare, elles sont plus élevées à 1 650 € / ha pour le groupe supérieur à 1 000 000 litres et plus faibles à 1 400 € / ha pour le groupe 600 à 800 000 litres. Et inversement, si la comparaison est faite par 1 000 litres, avec 250 € pour le groupe 600 à 800 000 litres et 237 € pour le groupe supérieur à 1 000 000 litres. Les économies d’échelle doivent donc être appréhendées avec prudence. Les écarts ne sont pas systématiques selon les systèmes de production de l’exploitation.
Les plus grands troupeaux ont un endettement plus fort en moyenne
La situation financière se dégrade légèrement avec une hausse du taux d’endettement de deux points. En effet, de nouveaux investissements ont été réalisés pour 115 000 € en moyenne par exploitation (120 € / 1 000 litres). Le montant varie de 75 000 € à 155 000 €, selon la production laitière. Le plan de relance et les dispositifs d’aide à l’investissements ont facilité ces investissements. Ainsi le fonds de roulement et la trésorerie nette globale se détériorent.
Le prix de revient du lait a augmenté alors que le prix de vente à baissé
Seulement ¼ des exploitations ont leur prix de revient couvert par le prix de vente du lait
Le prix de revient de 388 € en moyenne a progressé de + 15 € / 1 000 litres entre les deux campagnes, pendant que le prix de vente chutait à 367 € (- 4 € / 1 000 litres).
L’augmentation du prix de revient est essentiellement liée à la hausse du coût alimentaire, aux charges de personnel et aux nouveaux investissements réalisés. Le coût de revient moyen cache de fortes disparités entre les exploitations. Il y a des moyennes de 334 € à 401 € selon les quartiles supérieurs et les moyennes des groupes observés.
Le prix de vente couvre le prix de revient uniquement des groupes meilleurs à hauteur de 335 – 340 € / 1 000 litres
Les charges alimentaires et les frais de mécanisation (travaux par tiers, carburant, entretien matériel et amortissements) sont les postes les plus importants. Ils représentent 40 % du coût de production. Le coût de revient est en hausse depuis plusieurs années. Le prix du lait observé ne permet pas de couvrir ce prix de revient élevé, au regard de la conjoncture actuelle intégrant la rémunération de 36 000 € / UTAF.
Le coût de revient des 25 % meilleurs est inférieur de 45 à 60 € avec une meilleure maitrise des charges
Les 25 % meilleurs, quel que soit le groupe, se distinguent de la moyenne par une meilleure maitrise des charges en général. Leur coût alimentaire est inférieur de 15 € / 1 000 l en moyenne. Il s’agit essentiellement du coût de concentré, mais également du coût de la surface fourragère. L’ensemble des frais de mécanisation sont aussi réduits (carburant, entretien, amortissement), les frais bâtiments mais aussi le coût de la main-d’œuvre en lien avec la productivité et la gestion du travail (temps de travail, charge mentale, organisation, délégation).
Pour les meilleurs, les annuités représentent 3 à 5 points de valeur ajoutée de moins que la moyenne : ils ont une stratégie d’investissement plus économe
La maîtrise des charges et la gestion des investissements permettent de dégager une meilleure rentabilité d’entreprise pour les plus performants. Si, le revenu disponible est en moyenne de 21 000 à 27 000 € par UTAF selon les groupes. Il atteint 40 000 € en moyenne pour les 25 % meilleurs.
Cette grande dispersion est liée aux entrepreneurs selon leur technicité et leur choix de production et de gestion. L’écart de prix de revient est de 75 € par 1 000 litres entre les groupes supérieurs et inférieurs. Sur l’exploitation moyenne, c’est potentiellement plus de 70 000€ !
Annexe 1 : éléments méthodologiques
- Période d’étude technico-économique et financière : clôtures comptables de 12 mois comprises entre le 31/07/2020 et le 30/06/2021
- Comparaison des résultats en échantillon constant sur deux ans
- Sélection des dossiers :
- Grands troupeaux : classement en OTEX 45 (bovins lait spécialisés) et produit lait ≥ 50 % du produit total d’activités, présence d’une marge sur l’atelier laitier, ou sur les vaches laitières et les élèves laitiers ; lait produit ≥ 600 000 L sur l’exploitation (855 exploitations)
- Trois groupes de production en grands troupeaux : ≥ 600 000 et < 800 000 L produit par exploitation (329 exploitations) ; ≥ 800 000 et < 1 000 000 L produits (271 exploitations) ; ≥ 1 000 000 et < 1 400 000 L (198 exploitations)
- 25 % sup : 25 % des exploitations « grands troupeaux » dégageant le prix de revient le plus bas
- Calcul du coût de revient : selon la même méthode que pour l’observatoire de production laitière :
- Répartition des charges de structure entre activités selon des clés d’affectation basées sur les surfaces, les produits, les charges, les capitaux et le temps de travail
- Rémunération de 1 % des capitaux propres affectés à l’activité
- Rémunération nette de 36 000 € de l’actif à temps plein affecté à l’activité.
- Pour la réalisation de la carte, la période retenue concerne les clôtures comptables du 30/04/2020 au 31/03/2021.
Annexe 2 : synthèse des résultats des exploitations laitières spécialisées « grands troupeaux »
Vous pouvez retrouver l’ensemble de nos observatoires économiques sur le lait, sur notre site internet.