Ukraine : impact sur économie

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Guerre en Ukraine : quel est l’impact sur l’économie française ?

La Russie a lancé une offensive contre l’Ukraine le 22 février dernier. Les marchés sont perturbés par le conflit, entre risque de pénurie et flambée des prix. Mais quel est l’impact potentiel sur l’économie française, notamment sur l’agriculture ?

Un conflit débuté en 2014

La Russie a lancé une offensive militaire contre l’Ukraine.

Cette guerre entre les deux pays a commencé en 2014, avec l’annexion par la Russie de la Crimée, péninsule ukrainienne située au sud du pays, à la frontière avec la Russie. Cette même année, les affrontements concernent également Donbass, Donetsk et Lougansk. Les conflits armés prennent alors fin avec l’accord de Minsk.

Les frontières contestées depuis 2014
Les frontières de l’Ukraine contestées depuis 2014

En février 2022, les conflits armés reprennent et, lors de son discours du 21 février, Vladimir Poutine reconnaît officiellement l’indépendance des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk.

Dès le lendemain, les troupes russes franchissent la frontière ukrainienne. Le 24 février, la Russie a pris le contrôle du site de Tchernobyl, source d’inquiétude pour les pays européens qui craignent des conséquences comme en 1986.

À ce jour, des combats se déroulent à Kiev et dans d’autres villes de l’Ukraine.

La réponse internationale : une guerre économique

L’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), dont l’objectif est de garantir la liberté et la sécurité de ses membres par des moyens politiques et militaires, a décidé de ne pas s’engager dans le conflit, l’Ukraine n’étant pas membre de l’Alliance.

Suite à la demande de l’Ukraine, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (ONU) tiendra le 3 mars une session spéciale sur les opérations militaires russes.

La réponse à l’offensive russe n’est pas une réponse militaire mais une réponse économique. En effet, les annonces de sanctions économiques à l’encontre de la Russie pleuvent ces derniers jours. Seules les principales seront citées ici.

Les sanctions économiques à l’encontre de la Russie

L’Union européenne (UE), qui a affirmé son soutien à l’Ukraine, vise un isolement économique de la Russie. Elle a annoncé le 27 février le déblocage de 450 millions d’euros pour acheter des armes pour l’Ukraine, ainsi que la fermeture de l’espace aérien européen aux avions russes.

Le Royaume-Uni met en place des mesures visant à exclure les banques russes du système financier britannique. C’est également le cas du Japon qui s’attaque au secteur financier et à l’exportation de composants électroniques.

Le Président américain, Joe Biden, a imposé des restrictions d’exportation vers la Russie ainsi qu’un blocage complet de l’accès au système financier américain.

Le Canada a suspendu les permis d’exportation pour la Russie, pour une valeur de près de 500 millions d’euros, visant notamment des entreprises du secteur aérospatial, minier et des technologies de l’information.

Le gouvernement australien applique également des sanctions, telles l’interdiction d’échanges avec les banques publiques russes.

La Nouvelle-Zélande a suspendu toutes discussions avec la Russie et interdit l’entrée sur son territoire des membres du gouvernement russe.

Ces sanctions pèsent déjà sur la monnaie : au 1er mars, le rouble a perdu 34 % de sa valeur face au dollar par rapport au 23 février. La monnaie ukrainienne (hryvnia) est, quant à elle, relativement stable sur cette même période.

Evolution du rouble et du hryvnia au 1er mars
Impact sur l’évolution du rouble et du hryvnia au 1er mars

Une balance commerciale positive avec l’Ukraine, négative avec la Russie

L’export vers l’Ukraine et la Russie représente 7,6 milliards d’euros en 2021, soit 1,6 % de l’ensemble des exportations françaises. La France importe 10,6 milliards d’euros de ces deux pays (majoritairement de la Russie), soit 1,8 % des importations.

Plus d’un quart des importations en provenance d’Ukraine sont des huiles, graisses ou tourteaux

L’accord de libre-échange entre l’UE et l’Ukraine est entré en vigueur de manière définitive en 2017. En 2021, la valeur des exportations françaises vers l’Ukraine s’élève à 1 212 millions d’euros, celle des importations en provenance d’Ukraine à 880 millions d’euros. La balance commerciale affiche donc un solde positif en faveur de la France.

La moitié des exportations françaises vers l’Ukraine (en valeur) est concentrée dans cinq secteurs. Les produits chimiques arrivent alors en tête, avec principalement des fongicides, herbicides, insecticides et huiles essentielles.

Pour les importations en provenance d’Ukraine, cinq secteurs concentrent les deux tiers de la valeur. Deux secteurs sont donc d’importance : les huiles, graisses et tourteaux (huile de tournesol essentiellement) et les produits de la culture et de l’élevage (les 4/5e en graines de colza).

La France est très dépendante de l’Ukraine pour les importations d’huile de tournesol : les deux tiers importés en France proviennent d’Ukraine. La dépendance française est également forte pour les noix, les graines de colza et la caséine.

Poids de l'Ukraine dans les exportations et les importations
Poids de l’Ukraine dans les exportations et les importations

Une forte dépendance de la France à la Russie pour la houille, les produits pétroliers et les minerais métalliques

En 2021, la valeur des exportations françaises vers la Russie s’élève à 6 431 millions d’euros, celle des importations en provenance de Russie à 9 677 millions d’euros. La balance commerciale affiche donc un solde négatif pour la France.

Le secteur le plus exportateur vers la Russie est celui de la construction aéronautique et spatiale (27 % des importations russes), essentiellement des avions.

Cinq secteurs concentrent 87 % de la valeur des importations françaises en provenance de la Russie. Les produits pétroliers arrivent en tête (gazoles, naphta, carburéacteurs, fiouls lourds, etc.), suivi des hydro-carbures naturels (huiles brutes de pétrole, gaz).

Poids de la Russie dans les exportations et les importations
Poids de la Russie dans les exportations et les importations

En termes d’importations, la France est alors particulièrement dépendante de la Russie pour les produits ferreux (65 % des importations françaises proviennent de Russie), huiles et autres produits de la distillation des goudrons, uranium et plutonium, houille, pulpe de betteraves, gazoles, poudres et paillettes d’aluminium, etc.

Produits importés par la France dont la part en provenance de Russie ou d'Ukraine est importante
Produits importés par la France dont la part en provenance de Russie ou d’Ukraine est importante

Des marchés agricoles perturbés

L’agriculture est un des secteurs qui sera le plus perturbé par la guerre en Ukraine. Les tensions sur les marchés (pénuries, envolée des prix), constatées depuis plusieurs mois, s’accentuent. Les coûts de production risquent donc de connaître une forte hausse.

Les marchés des céréales s’enflamment

La Russie est le 1er exportateur mondial de blé, l’Ukraine est le 5e. Les deux pays concentrent ainsi 30 % des exportations mondiales de blé. Les stocks de blé semblent suffisants donc il ne devrait pas y avoir de pénurie. Mais les prix s’envolent. Au 1er mars, le prix du blé meunier atteint un nouveau record : 351,25 euros la tonne sur l’échéance de mars 2022.

En 2021, la France a importé 75 millions d’euros de blé, dont seulement 0,002 % en provenance de Russie et 0,001 % en provenance d’Ukraine. Les principaux fournisseurs de la France sont l’Allemagne, la Roumanie et l’Italie. La France est surtout exportatrice de blé : 3 851 millions d’euros en 2021.

L’Ukraine est le 4e exportateur de maïs. Au 1er mars, le prix du maïs atteint également un record : 340 euros la tonne sur l’échéance de mars 2022. La France a importé près de 290 millions d’euros de maïs en 2021, dont 0,002 % de Russie et 0,486 % d’Ukraine. Comme pour le blé, la dépendance de la France à ces deux pays pour le maïs est très faible. Les principaux fournisseurs de la France sont l’Allemagne, le Chili, la Roumanie et la Hongrie.

La France est exportatrice de céréales (la moitié de sa production), il n’y aura pas de pénurie. Mais même si la dépendance française aux exportations russes et ukrainiennes est mesurée pour le blé et le maïs, les prix suivent les marchés mondiaux

Une forte dépendance de la France à l’Ukraine pour l’huile de tournesol

Pour cette production, la situation française est plus problématique. L’Ukraine est le 1er producteur mondial d’huile de tournesol. Deux tiers des importations françaises proviennent d’Ukraine (20 % proviennent de Bulgarie). Une pénurie est donc inévitable.

Un impact sur l’alimentation animale

L’augmentation des prix des céréales renchérit le prix de l’alimentation animale, ce qui a un impact significatif sur les coûts de production des éleveurs français.

Le blé ukrainien, souvent le moins cher du marché, trouve notamment comme débouché l’alimentation animale. Le tournesol (huile et tourteaux) est surtout utilisé pour les volailles.

Une mauvaise nouvelle notamment pour la filière porcine pour laquelle le prix de l’aliment était déjà très haut. La filière est en crise depuis plusieurs mois et un plan d’urgence a été lancé par le gouvernement en janvier 2022, avant le conflit …

Un approvisionnement en engrais perturbé

La Russie est le 2e producteur mondial de gaz au monde, après les États-Unis. Le marché russe ne représente que 10 % des importations françaises de gaz (naturel, liquéfié ou gazeux). Les fournisseurs principaux de la France sont la Norvège et l’Algérie. Toutefois, les prix des engrais sont étroitement liés à ceux du gaz, qui augmentent. En outre, 10 % des engrais français sont fabriqués en Allemagne, avec du gaz russe.

L’approvisionnement en engrais pourrait donc être perturbé et les prix renchéris, ce qui aura un impact sur la récolte 2022. Faut-il privilégier les cultures nécessitant un faible apport en azote ?

Face aux éventuelles retombées économiques du conflit sur la France, un plan de résilience économique et social a été annoncé le 2 mars 2022 par le gouvernement. Les modalités sont à suivre.

Toutes les informations de veille macroéconomique sont disponibles sur notre site internet.

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