De la fourche à la fourchette | Mars 2023

Temps de lecture : 5 minutes

Mars 2023 de la fourche à la fourchette : trimestre anti-infation et agrivoltaïsme

Au sommaire de notre dernière publication de la fourche à la fourchette de mars 2023 :

  • Le trimestre anti-inflation
  • L’agrivoltaïsme : une solution ?

Le trimestre anti-inflation

Bruno Le Maire a annoncé début mars le lancement d'un « trimestre anti-inflation »
Bruno Le Maire a annoncé début mars le lancement d’un « trimestre anti-inflation »

Lancement d’un « trimestre anti-inflation »

Bruno Le Maire a annoncé début mars le lancement d’un « trimestre anti-inflation », fruit d’un accord avec les distributeurs qui se sont engagés à proposer les prix « les plus bas possibles » jusqu’en juin sur une sélection de produits à leur discrétion.

Après la fin des négociations commerciales annuelles entre les supermarchés et l’industrie agroalimentaire. On ignore encore précisément de quel ordre sera la hausse des prix. Mais la facture va grimper pour tout le monde (+ 10 à 12 %). Ces négociations ont pour but de fixer chaque année le prix et les conditions auxquelles les grandes surfaces s’approvisionneront auprès des industriels. Les industriels souhaitent répercuter la flambée de leurs coûts de production et payer les éleveurs à leur juste prix, subissant eux aussi une hausse des coûts de production des agriculteurs sur la dernière année, c’est 18 % de hausse de charges.

Dans ce contexte, le gouvernement souhaite mettre en place dans les prochains mois un « chèque alimentaire » pour les ménages les plus modestes, avec la collaboration des enseignes de la grande distribution.

Ce dispositif vient remplacer le projet de « panier anti-inflation », abandonné faute d’accord au sein de la grande distribution sur une liste de produits commune à toutes les enseignes.

Qu’est ce que le « trimestre anti-inflation » ?

Concrètement, les supermarchés s’engagent à vendre en rayons des centaines de produits aux prix les plus bas possibles, en rognant sur leurs marges, pendant trois mois. Chaque distributeur reste libre de définir sa liste de produits à prix cassés. Ils seront identifiables grâce à un logo tricolore « trimestre anti-inflation ». L’essentiel des opérations commerciales portera sur les produits de marque distributeur. Sur lesquelles les enseignes ont le plus de « latitude » pour fixer les prix. 

À l’issue de ce « trimestre anti-inflation », les négociations commerciales reprendront normalement avec les grands industriels de façon à ce que la baisse des prix de gros, observée sur les marchés mais qui n’est pas encore transmise aux produits de consommation courante, puisse se traduire sur les produits du quotidien.

Face à l’inflation alimentaire qui a atteint 14,5 % sur un an en février selon l’Insee, le gouvernement cherchait depuis plusieurs mois un mécanisme de soutien au pouvoir d’achat.

Le but est de mieux rémunérer les agriculteurs et les industriels, mais aussi de préserver le pouvoir d’achats des ménages.

L’agrivoltaïsme : une solution ?

Dans le contexte de l’envolée des prix de l’énergie et du changement climatique, le Parlement veut accélérer le déploiement de panneaux solaires dans les champs. Au croisement de l’agriculture et de la production d’énergie, l’agrivoltaïsme consiste à produire de l’électricité à partir de panneaux photovoltaïques implantés sur des parcelles agricoles. L’agrivoltaïsme, concept récent, a désormais une définition légale centrée sur le principe de synergie entre l’activité agricole et la production d’électricité verte.

Enfin une première définition, mais avec des questions en suspens

Aujourd’hui, les débats techniques se poursuivent : où autoriser l’agrivoltaïsme ? Comment l’autoriser ? Comment éviter que cela crée de la spéculation sur les terres agricoles ? La loi interdit les panneaux photovoltaïques au sol sur les terrains agricoles, sauf pour des friches de très longue durée, à savoir des terrains agricoles qui seraient abandonnés depuis longtemps. La loi n’autorise que l’agrivoltaïsme, défini comme un outil au service de la production agricole pour la protéger contre le changement climatique.

Pour l’installation, les panneaux doivent apporter au moins un des services suivants :

  • l’amélioration du potentiel et de l’impact agronomique (rendement et qualité) ;
  • l’adaptation au changement climatique ;
  • la protection contre les aléas (gel, grêle, températures élevées, abri animaux en cas de fortes chaleurs) ;
  • l’installation doit garantir une production significative et un revenu durable.

Cependant des questions restent en suspens, et notamment la rémunération et le partage de la valeur entre les différents acteurs (propriétaires, fermiers exploitants, énergéticiens).

Cette définition devrait accélérer le déploiement de l’agrivoltaïsme qui dispose d’un potentiel considérable en France selon l’INRAE.

 Un déploiement attendu d’ici les prochaines années

Des simulations montrent qu’avec moins de 2 % de la surface agricole utilisée en France (30 millions d’hectares). Il serait possible de produire autant d’électricité que le parc nucléaire français actuel selon Christian Dupraz, chercheur à l’INRAE. La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) a défini des objectifs ambitieux. Elle prévoit passer d’un parc photovoltaïque d’une puissance de 14 GW en 2022 à au moins 35 GW en 2028.

Les innovations se multiplient : panneaux mobiles, pliables, s’adaptant aux serres ou à la culture en plein champ et transformant le reste en électricité. Une cinquantaine de centrales agrivoltaïques en France sont en service ou en construction avec des démonstrateurs. Cela permet la collecte de données pour mesurer les impacts de ces nouvelles pratiques.

Les solutions existent pour concilier production d'énergie photovoltaïque au sol et activités agricoles
Les solutions existent pour concilier production d’énergie photovoltaïque au sol et activités agricoles

 Voici quelques exemples

Une canopée solaire pour climatiser des céréales de TSE

En 2022, l’opérateur TSE a inauguré sa première canopée solaire agricole en Haute-Saône. Au cœur d’une exploitation de 850 hectares, l’ombrière d’une puissance de 2,4 MW couvre une surface de trois hectares où sont cultivés soja, blé, seigle fourrager, orge d’hiver, colza… Les panneaux solaires suivant l’axe du soleil d’est en ouest, l’installation doit atténuer les stress thermiques et hydriques.

Une haie solaire au milieu des vaches

Avec l’INRAE, Engie Green a installé neuf haies composées de 252 panneaux verticaux bifaciaux orientés est-ouest, sur une prairie d’un hectare. Les panneaux solaires cohabitent avec des bovins. Ils doivent produire 100 MWh par an. 50 capteurs agronomiques et météorologi-ques assureront le suivi pendant l’expérimentation.   

Des moutons paissent à l’ombre en Ariège avec Arkolia

Depuis 2014, cette centrale solaire installée par Arkolia Énergies occupe 7,8 hectares et un pâturage de 25,5 ha. Cette installation couvre 36 % des besoins en fourragers des 130 brebis et 19 % des besoins de l’ensemble des cheptels, dont dix vaches, dix chevaux et dix truies.

Une expérimentation en Normandie en 2023

En Normandie, deux projets similaires devraient voir le jour d’ici l’automne 2023 avec une production de vaches qui vont brouter en dessous. Il s’agit de mesurer l’impact des ombrières sur le comportement des vaches, la qualité du lait, la pousse de l’herbe mais aussi sur les cultures de céréales et de légumineuses en lien avec l’évolution climatique. Ces deux expérimentations et les résultats serviront ensuite pour les agriculteurs de tout l’ouest de la France.

Des décrets à venir pour éviter toutes dérives ?

Des voix s’élèvent avec des craintes que la production d’énergie prenne le pas sur la production agricole, menant à une artificialisation déguisée des sols, avec des conséquences sur les prix du foncier, la productivité des exploitations et la transmission des entreprises.

D’autres estiment que les objectifs de la PPE sont largement atteignables par les installations sur les toitures, les parkings, les friches industrielles et surfaces non agricoles (à partir des estimations de l’ADEME). À ce jour, les impacts sont encore peu connus sur la perte de rendements avec le facteur limitant de la lumière sur la croissance des plantes, la concentration de la pluviométrie suite au ruissellement sur les panneaux, etc.

 Il est primordial d’associer l’agriculteur au développement du projet pour être en cohérence avec ses pratiques.

Les surfaces concernées par ces projets sont encore limitées, mais les ambitions énergétiques françaises risquent de changer la donne. Les décrets à venir devront être précis afin de prévenir toutes dérives.

Retrouvez toutes nos fourches à la fourchette sur notre site internet.

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