Observatoire production porcine 2023 : résultats 2022 et perspectives
Notre nouvel observatoire sur la production porcine 2023 présentent les résutlats 2022 et les perspectives de cette production spécialisée.
Les résultats des exploitations porcines s’améliorent en 2022. Malgré l’augmentation du prix de l’aliment tout au long de l’année, le prix de vente du porc profite d’une réduction de l’offre européenne. Il permet alors de faire face à l’augmentation des charges. Dans ce contexte, le décalage des flux de trésorerie peut mettre en difficulté les éleveurs dont les performances sont limitées.
En 2022, la baisse de l’offre européenne compense la hausse des charges chez les éleveurs
En juin 2022, le prix de revient en élevage porcin spécialisé naisseur engraisseur s’élève en moyenne à 1,625 € du kg de carcasse.
Il est en hausse de plus de 8 cts en un an. L’augmentation du prix de l’aliment consommé, débutée au second semestre 2021, se poursuit tout au long de l’année 2022. Le prix de l’aliment sur 12 mois passe de 277 € la tonne au premier trimestre à 351 € la tonne au dernier trimestre 2022 (soit + 74 € / t ou + 26 %).
Toutefois, une partie de la hausse du coût alimentaire (+ 21 cts du kg de carcasse) est compensée par :
- la progression de la valeur du stock de porcs (liée à 90 % à l’augmentation de la valeur unitaire du porc en stock, soit une atténuation de 6 cts du kg de carcasse sur le prix de revient) ;
- l’attribution d’aides liées au plan de sauvegarde de la production porcine. Ces aides ont représenté en moyenne 37 000 € par élevage, soit 140 € par truie ou 6 cts du kg de carcasse.
Sur cette période, les éleveurs ont vendu leurs porcs charcutiers à 1,656 € le kg de carcasse, soit 14 cts de mieux qu’un an auparavant. L’amélioration des cotations au Marché du Porc Breton à partir du printemps s’explique :
- principalement par la réduction de l’offre française et nord européenne ;
- secondairement par la reprise de la consommation intérieure des ménages et de la restauration hors domicile.
Aussi, les éleveurs ont pu rémunérer en moyenne leur travail à plus de deux SMIC par unité de main d’œuvre.
Mais les cycles du porc et de l’aliment ne sont pas calés sur le même rythme
En 2022, la tendance sur le prix de l’aliment est guidée par la baisse de l’offre mondiale de céréales et d’oléagineux à la récolte 2021. Mais les tensions politiques à partir de fin février (guerre en Ukraine) amplifient également à la hausse le prix des matières premières.
Reprise du prix du porc après la flambée du prix de l’aliment
La réduction des cheptels en Europe entraine de moindres besoins pour l’alimentation animale. En Europe, les utilisations de céréales pour l’alimentation animale ne captent plus que 52 % des volumes utilisés sur la campagne 2022/23. Aussi, le poids de la demande en fabrication d’aliments dans le prix de l’aliment a tendance à se réduire.
D’autre part, le prix de vente du porc en France est corrélé à celui des autres bassins européens (Espagne et Allemagne, les deux principaux producteurs) et sur leur capacité à l’export vers les pays tiers.
Or, malgré une demande chinoise qui s’est fortement contractée en 2022 (baisse des exports européens vers cette destination de 40 %), le prix du porc en France a bénéficié de la déprise des filières nord européennes, suite à l’épisode de fièvre porcine africaine en Allemagne et la moindre croissance de la production espagnole. Cela explique l’accélération subite de la hausse du prix du porc à la fin du printemps 2022, sans corrélation avec celle du prix de l’aliment commencée plusieurs mois auparavant.
Impact des écartes de tendance entre les deux principaux indicateurs de conjoncture porcine
Ces écarts de tendance entre les deux principaux indicateurs de conjoncture porcine peuvent mettre ponctuellement en difficulté les producteurs. Cela a été le cas sur le premier semestre 2022 où l’augmentation du prix de vente du porc et le versement des aides exceptionnelles par l’État ont été trop tardifs face aux difficultés de trésorerie de certains éleveurs.
Depuis l’été 2022, outre la poursuite de la hausse du prix de l’aliment, les éleveurs ont fait face à l’augmentation du prix de l’énergie et au contexte inflationniste sur les autres charges d’exploitation (coût de la main d’œuvre salariée, assurances, etc.).
L’énergie représentait en moyenne 3 % des charges d’une exploitation porcine spécialisée, soit 3 à 4 cts du kg de carcasse. Avec l’augmentation des prix du gaz en Europe, et donc de l’électricité (principale énergie utilisée dans les élevages de porcs), on peut estimer un surcoût de 2 cts du kg en 2023 entre les différentes modalités d’achat d’électricité chez les producteurs (tarif réglementé, contrat indexé, nouveau contrat, etc.).
Perspectives d’évolution du prix de revient en comparaison du prix de vente attendu pour la production porcine
Les perspectives d’évolution entre le prix de revient estimé en juin 2023 et le prix de marché montrent une situation qui reste toutefois favorable aux éleveurs en moyenne sur l’année écoulée.
De plus, l’érosion du prix de l’aliment depuis le début de l’année 2023, les perspectives d’une bonne récolte mondiale et d’une moindre inflation sur les autres charges d’exploitation pourraient limiter le prix de revient dans les mois à venir.
L’inconnue reste l’évolution du prix de vente à court terme. Si les premiers signes d’une reprise estivale de la consommation européenne se manifestent, l’inflation sur les prix des pièces et de la charcuterie en magasin conditionne les volumes de vente. Les GMS pourraient alors être tentées de s’approvisionner à partir de produits importés moins chers, mettant un peu plus en difficulté les salaisonniers français. Quant à l’espoir d’une reprise des exportations européennes vers la Chine en 2023, il apparait limité. Le prix du porc en Chine est en baisse régulière sous l’effet d’un développement de la production et d’une consommation insuffisante.
Malgré un prix de vente du porc au-dessus des deux euros le kilogramme, l’avenir de certains producteurs de porcs reste incertain. En effet, l’imprévisibilité de la conjoncture à court terme nécessite la constitution d’une épargne de précaution, qu’aujourd’hui tous les producteurs ne sont pas en mesure de réaliser.
Des marges brutes en ordre dispersé
L’analyse des marges brutes des éleveurs montre une nouvelle fois des écarts importants de performance entre les élevages.
Ateliers naisseur engraisseur
En atelier naisseur engraisseur, la marge brute moyenne se situe à 0,455 € du kg de carcasse produit ou 1 000 € par truie présente. L’écart de marge brute par truie entre le quart inférieur et le quart supérieur s’élève à environ 1 000 €.
Il s’explique par des différences de :
- performances techniques sur la productivité des truies et les poids de carcasse
- valorisation des porcs : hors variation mensuelle du prix de vente du kg de carcasse entre les dates de clôture des deux échantillons, un écart de 5 cts du kg subsiste en faveur des éleveurs du quart supérieur (taux de muscle des pièces supérieur à 56 %, porcs dans la gamme de poids, plus-value liée à la qualité (charte, cahier des charges, etc.)
- prix de l’aliment consommé qui dépend notamment de la part d’aliment produit sur l’exploitation, de la nature des aliments achetés adaptés à la croissance des porcs et de la gestion des achats (anticipation, volume).
Ces choix différents de conduites techniques et de gestion de l’élevage impactent les résultats de l’exploitation d’autant plus vite dans le contexte de volatilité des prix et d’absence de corrélation entre prix du porc et prix de l’aliment.
Atelier engraisseur
En atelier engraisseur, la marge brute moyenne s’élève à 19 € par porc. On constate également des écarts conséquents de marges brutes entre quart inférieur et quart supérieur. Là aussi, ces écarts ont pour origine des différences de performance technique, devalorisation des porcs et deprix d’achat de l’aliment.
Les situations financières s’améliorent
Quels que soient les systèmes de production avec un atelier porcin, la rentabilité par actif exploitant en 2022 est en nette progression (de + 30 à + de 50 % d’amélioration en une année).
Malgré une faible augmentation des annuités entre 2021 et 2022, la pression financière décroit pour laisser davantage de revenu disponible aux éleveurs. Celui-ci est principalement utilisé pour financer les stocks supplémentaires et un surcroit d’investissement dans les bâtiments. La stabilité des prélèvements privés facilite la consolidation des trésoreries.
La conjoncture porcine de fin d’année 2022 et du premier semestre 2023 plutôt favorable doit permettre d’améliorer encore les fonds de roulement des exploitations, et d’envisager une modernisation des équipements. Celle-ci est indispensable pour préserver les performances techniques et le confort de travail, deux facteurs indispensables à une bonne transmission des élevages.
Annexe : éléments de méthode pour rédiger l’observatoire production porcine 2023
- Période d’étude : clôtures comptables de 12 mois comprises entre le 31/01/2022 et le 31/12/2022
- Comparaison des résultats sur deux ans par système de production selon le poids du chiffre d’affaires porc dans le chiffre d’affaires total (aides PAC non comprises)
- Marges brutes des exploitations porcines selon l’orientation de l’atelier
- Calcul du prix de revient du kg de carcasse :
- Sélection d’un sous-groupe d’exploitations spécialisées avec un atelier naisseur engraisseur
- Répartition des charges de structure entre activités, selon des clés d’affectation basées sur les charges par hectare des exploitations spécialisées en céréales et oléo protéagineux
- Rémunération de 1 % des capitaux propres affectés à l’activité
- Rémunération brute de 38 500 € par actif affecté à temps complet à l’activité porcine.
L’observatoire est intégralement téléchargeable ci dessous :
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