Brexit impact économique

Temps de lecture : 7 minutes

Impact économique du Brexit : où en est-on ? Quelles conséquences sont à prévoir ?

Découvrez notre note de veille consacrée à l’impact économique du Brexit.

Publication : 31/01/2020 – Rédaction : Mélanie JUGE et Caroline LEVOUIN

Le Brexit aura bien lieu le 31 janvier 2020. Les changements concrets n’interviendront qu’à partir de 2021, après des négociations commerciales.

Les échanges commerciaux entre la France et le Royaume-Uni sont nombreux. Le Brexit aura donc des conséquences sur toutes les filières françaises concernées par ces échanges, sur la logistique portuaire, les démarches administratives et la compétitivité des entreprises.

Après bien des rebondissements, le Brexit aura lieu le 31 janvier 2020

C’est en juin 2016 que le référendum sur le maintien ou le retrait du Royaume-Uni (RU) de l’Union Européenne (UE) est organisé au RU, suite à une promesse électorale du Premier Ministre britannique de l’époque, David Cameron. Le retrait l’emporte, avec 51,9 % des votants. Le Brexit est lancé.

Lancement de la procédure de retrait auprès du Conseil Européen

David Cameron démissionne, Theresa May le remplace. Elle lance formellement la procédure de retrait (article 50) auprès du Conseil Européen le 29 mars 2017. Cela ouvre alors une période de négociation de deux ans, qui devait se solder par un retrait du RU de l’UE au plus tard le 31 mars 2019. Le Français Michel
Barnier est chargé de négocier pour l’UE
l’accord de retrait avec le RU. Celui-ci est entériné à Bruxelles le 25 novembre 2018. Mais Theresa May ne réussit pas à convaincre le Parlement Britannique, qui rejette cet accord le 15 janvier puis le 12 mars 2019.

Alors que l’échéance approche, l’absence d’accord inquiète les acteurs économiques. L’UE accorde un nouveau délai au RU : il devra quitter l’UE au plus tard le 31 octobre 2019. Le RU participe aux élections européennes de mai 2019. Des eurodéputés britanniques sont élus, ils devront quitter le Parlement Européen au moment du Brexit, et une partie des sièges sera redistribuée aux 27 membres restants de l’UE.

La crise politique aura raison de Theresa May. Elle démissionne et est remplacée par l’europhobe Boris Johnson en juillet 2019. Il négocie avec l’UE quelques
modifications dans l’accord de retrait (notamment sur la question de la frontière nordirlandaise). Confronté lui aussi à des difficultés politiques, le 28 octobre, il obtient de l’UE un nouveau report, jusqu’au 31 janvier 2020.

Le Brexit aura lieu

Des élections anticipées sont demandées par Boris Johnson le 12 décembre. Son objectif est d’obtenir une majorité parlementaire afin de faire adopter son accord avec l’UE. Un pari gagné, car les conservateurs, le parti de Boris Johnson, ont obtenu une large majorité. Depuis, l’accord de retrait poursuit son chemin
législatif au RU.

Le Brexit aura donc bien lieu au 31 janvier 2020, et l’accord négocié entre l’UE et Boris Johnson s’appliquera, avec une période transitoire jusqu’au 31 décembre 2020. Il n’y aura pas de changement concret durant la période transitoire. Le RU contribuera au budget européen de 2020, mais pas au-delà.

Le flou perdure à l’issue de la période transitoire. Un accord portant sur les futures relations commerciales et la sécurité doit être négocié entre le RU et l’UE dans les mois à venir. Michel Barnier reste le négociateur de l’UE. Boris Johnson tient à ce que les négociations commerciales soient terminées fin 2020, un
délai qui semble pour le moins ambitieux vu de Bruxelles.

Quelles conséquences potentielles du Brexit sur l’économie française ?

Le Royaume-Uni : 6e client et 8e fournisseur de la France

Le Royaume-Uni réalise la moitié de ses échanges extérieurs avec l’Union Européenne. Tant que l’accord n’est pas validé, une incertitude règne sur le maintien de ces flux. L’Irlande serait le pays le plus impacté par le Brexit. Toutes les entreprises ayant une relation d’échange avec le RU seront concernées par les modalités de l’accord.

Les relations économiques entre la France et le RU ne sont pas négligeables : 30 000 entreprises réalisent des exportations vers le RU et 100 000 importent des biens et services britanniques.

L’excédent commercial s’établit en 2018 à près de 12 milliards d’euros, en faveur de la France. Ainsi, le RU est le premier excédent bilatéral de la France. Il représente 6,8 % des exportations françaises et est ainsi le 6e client de la France.

Avec 3,7 % des importations françaises, le RU est également son 8e fournisseur.

Sur le marché des biens, l’excédent commercial est en faveur de la France. Les échanges sont intrabranches : machines (réacteurs nucléaires, matériels électriques, etc.), produits agricoles et agro-alimentaires (boissons, lait, etc.), matériels de transport (véhicules, aéronautique).

Sur le marché des services, l’excédent commercial est en faveur du RU. Les principaux postes d’exportation vers le RU sont les transports, les services aux entreprises et les voyages.

Les importations portent majoritairement sur les services financiers, les services aux entreprises et les télécommunications.

Des conséquences financières et douanières

Les pays membres de l’UE bénéficient d’une exonération de droits de douane et d’une simplification de la TVA lorsqu’ils commercent entre pays membres.

Donc, outre une logistique commerciale et administrative plus complexe, le risque réside dans la possible mise en place de barrières tarifaires et de contingents entre l’UE et le RU. Cela augmenterait le prix des produits exportés au RU. Ils seraient moins compétitifs par rapport aux produits britanniques. La concurrence avec d’autres exportateurs serait accrue.

L’évolution de la parité des monnaies €/£ sera aussi un facteur d’inquiétude pour la compétitivité des produits.

Une autre inconnue réside dans les conditions d’accès au marché britannique. Le RU conservera-t-il les standards européens ? Ou adoptera-t-il des normes
moins exigeantes ? Comment le comportement des consommateurs britanniques évoluera-t-il ?

Quel pourrait être l’impact du Brexit pour l’agriculture française ?

Le Royaume-Uni importe des produits agricoles et agroalimentaires français et européens

Avec une autosuffisance à 60 %, le RU est un grand importateur de produits
agricoles et agroalimentaires
, principalement d’UE. La France est son 3e fournisseur (vins, produits laitiers, céréales et boulangerie).

En 2018, les exportations françaises agricoles et agroalimentaires pèsent 5,5 milliards d’euros. La France est aussi le 2e  client du RU (spiritueux, produits de la mer, viande ovine). Le solde des échanges est largement excédentaire au profit de la France, avec une balance commerciale de 2,9 milliards d’euros.

Le marché britannique représente 9 % des exportations agroalimentaires
françaises.

Au RU, l’offre française est reconnue et appréciée pour sa qualité.

Le Brexit pourrait rendre plus difficile l’export vers le Royaume-Uni

La France est le premier fournisseur de vin du RU en valeur et 3e en volume, elle y a exporté 171 millions de litres de vin sur la campagne 2018-2019.

Avec 269 000 tonnes et 551 millions € en 2018, la France est le 2e fournisseur du RU en produits laitiers, derrière l’Irlande. Elle exporte essentiellement des fromages, de l’ultra-frais et du beurre.

En retour, le RU exporte des produits laitiers vers la France (cheddar, crème, lait, beurre), mais dans une moindre mesure (43 200 tonnes et 161,4 millions €).

Pour ces filières, le futur accord de libre-échange entre l’UE et le RU aura toute son importance. La chambre d’agriculture a évalué le coût d’un Brexit sans accord pour la ferme France à 500 millions €. Un scénario à éviter.

Comme pour l’ensemble de l’économie, les entreprises agricoles et agroalimentaires devront faire face à une logistique plus complexe, aux potentiels barrières tarifaires et contingents, ainsi qu’à l’incertitude financière face à l’évolution de la parité des monnaies €/£.

La concurrence pourrait être accrue sur le marché européen

La France n’est pas le seul pays européen à craindre de voir diminuer ses exportations vers le RU. Si le débouché britannique se restreignait, le marché européen pourrait s’engorger des excédents des pays actuellement exportateurs vers le RU. C’est notamment une inquiétude des filières viande.

En 2015 le Royaume-Uni a produit uniquement 75 % du bœuf, 92 % de l’agneau, 55 % du porc et 73 % du poulet consommé sur son territoire.

Ainsi, la filière bovine irlandaise, qui exporte 91 % de sa production, dépend
fortement du RU. La moitié y est exportée (principalement des découpes de premier choix). Et sur les 46 % exportés vers les autres pays de l’Union européenne, la moitié transite par le RU.

L’Irlande se prépare à l’avenir avec son programme « FoodWise 2025 », pour
augmenter ses exportations et améliorer la compétitivité de son agriculture.

Avec le Brexit, le budget européen perd un de ses contributeurs nets

Le RU est actuellement un contributeur net au budget européen, de l’ordre de 10 à 12 milliards d’euros par an. Son départ de l’UE pose la question du financement du budget européen à partir de 2021, et complexifie les négociations autour du prochain cadre financier pluriannuel 2021-2027. Il est pourtant important que ces négociations avancent, car elles conditionnent notamment l’avancée des discussions autour de la future politique agricole commune (PAC).

Les échanges extérieurs de la Normandie et des Pays de la Loire avec le Royaume-Uni

Le Royaume-Uni : 3e client et 7e fournisseur de la Normandie

Deux éléments caractérisent les échanges extérieurs de la Normandie : les activités industrielles (raffinage et pétrochimie, produits pharmaceutiques, biens d’équipements automobiles, aéronautique, etc.) et la présence de grands ports (Le Havre, Rouen et Cherbourg).

Le Royaume-Uni est le 3e pays d’échange pour les exportations normandes, après l’Allemagne et les Pays-Bas. L’excédent commercial est en faveur de la Normandie. Les produits principalement exportés sont les produits chimiques, parfums et cosmétiques, les produits agroalimentaires, les produits pétroliers et les matériels de transport.

Outre les conséquences déjà évoquées précédemment, la Normandie est en première ligne pour les conséquences douanières, avec notamment un risque de congestion des ports. Toutefois, le Brexit peut aussi être une opportunité, pour le port de Cherbourg notamment : l’Irlande perdra potentiellement des parts de marché au Royaume-Uni et se tournera vers le continent.

La sortie du RU de l’UE pourrait avoir un impact sur plusieurs filières normandes. C’est le cas notamment de la pêche (dépendance importante aux eaux britanniques), l’agriculture et les IAA (impact sur la PAC), les transports (la moitié des transports internationaux maritimes de France et près des deux tiers du trafic de conteneurs français passent par les ports normands), le tourisme (1re clientèle étrangère de Normandie), etc.

Le Royaume-Uni : 4e client et 9e fournisseur des Pays de la Loire

Les échanges extérieurs des Pays de la Loire se caractérisent notamment par les activités agricoles et agroalimentaires, la présence de la Raffinerie Total et celle du port de Nantes-Saint-Nazaire.

Le Royaume-Uni est le 4e pays d’échange pour les exportations ligériennes, après l’Allemagne, les États-Unis et l’Espagne.

L’excédent commercial, en faveur des Pays de la Loire, est porté pour moitié par les produits agricoles et agroalimentaires.

Outre ces secteurs, les produits principalement exportés sont les produits pétroliers, les produits de l’industrie automobile (véhicules et équipements), les matériels agricoles, de levage et de manutention, les produits de la construction aéronautique, et les équipements mécaniques, électriques et électroniques.

Comme toutes les régions d’échange avec le Royaume-Uni, le Brexit aura des conséquences sur les filières locales. Celles potentiellement les plus en « danger » sont la viticulture (la France est le 1er fournisseur de vin du RU) et la pêche (pour les mêmes raisons que la Normandie).

Découvrez notre note de veille consacrée à l’impact économique du Brexit au format PDF :

C’est au terme de négociations intenses qu’un accord de coopération et de libre échange a été conclu entre le Royaume-Uni et l’Union Européenne. Celui-ci s’applique depuis le 1er janvier 2021. Cet accord prévoit l’exonération de droits de douane sous conditions, et des conditions de concurrence équitable avec le maintien de normes élevées. Les formalités douanières sont rétablies, de même que les contrôles sanitaires et phytosanitaires.

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