Brexit et l’accord de coopération et de libre échange

Temps de lecture : 7 minutes

Brexit : l’accord de coopération et de libre échange est conclu

Découvrez l’accord de coopération et de libre échange conclu dans le cadre du Brexit dans cette note de veille économique.

Date de publication : 12/02/2021 – Rédaction : Mélanie JUGE

C’est au terme de négociations intenses qu’un accord de coopération et de libre échange a été conclu entre le Royaume-Uni et l’Union Européenne. Celui-ci s’applique depuis le 1er janvier 2021. Cet accord prévoit l’exonération de droits de douane sous conditions, et des conditions de concurrence équitable avec le maintien de normes élevées. Les formalités douanières sont rétablies, de même que les contrôles sanitaires et phytosanitaires.

Cette note fait suite à la note de veille économique de janvier 2020 « Brexit : où en est-on ? quelles conséquences sont à prévoir ? »

Épilogue du feuilleton politique du Brexit

Le peuple britannique s’était prononcé d’une courte majorité en faveur du retrait du Royaume-Uni (RU) de l’Union Européenne (UE) en juin 2016.

Les rebondissements politiques ont été nombreux depuis. L’accord de retrait, signé une semaine avant la date d’effet, est entré en application le 31 janvier 2020. Cet accord protège notamment les droits des citoyens de l’UE et des ressortissants du RU, les intérêts financiers de l’UE, la paix et la stabilité sur l’île
d’Irlande. Une période de transition s’est ouverte jusqu’à la fin de l’année 2020 pour préparer la mise en œuvre de cet accord et négocier un accord sur les relations futures.

Ces négociations ont été difficiles. C’est in extremis que trois accords ont été conclus la veille de Noël 2020 :

  • un accord sur l’échange d’informations classifiées,
  • un accord sur le nucléaire civil,
  • un accord de commerce et de coopération entre l’UE et le RU.

Ils ont été signés par la Présidente de la Commission européenne, le Président du Conseil européen et le Premier ministre britannique le 30 décembre 2020 et ratifiés par le Parlement britannique. La ratification par le Parlement Européen pourrait intervenir prochainement. L’accord de commerce et de coopération, qui régit les relations entre le RU et l’UE dans un certain nombre de domaines, est entré en application de façon provisoire dès le 1er janvier 2021. L’accord de retrait, qui traite de sujets distincts, reste en vigueur.

Le droit de l’UE a cessé de s’appliquer au RU le 31/12/2020 à minuit. Le RU ne bénéficie plus du principe de libre circulation des personnes, biens, services et capitaux, ni d’un accès fluide au marché unique et à l’union douanière de l’UE, ni des politiques et accords internationaux de l’UE.

La fin de la libre circulation des personnes

À compter du 1er octobre 2021, les Européens souhaitant se rendre au RU devront être munis d’un passeport en cours de validité. Une carte d’identité ne sera plus suffisante.

Un visa pourra être requis pour un séjour de plus de six mois ou pour l’exercice propre de l’activité professionnelle sur le territoire britannique.

Accord de commerce et de coopération : décryptage

les échanges de biens entre l'UE et ses partenaires
les échanges de biens entre l’UE et ses partenaires

Ni droit de douane, ni quota

L’exonération des droits de douane s’applique, sous réserve que les biens échangés respectent la condition de « produit originaire ». Il s’agit de prouver que le bien a été majoritairement produit soit dans l’UE, soit au RU. Sinon, le bien est soumis aux tarifs douaniers. Ainsi, un bien importé par le RU d’une autre région du monde et exporté en UE ne pourra se prévaloir d’être un « produit originaire ». Il devra donc s’acquitter des droits de douane européens.

Cela permet de préserver les flux commerciaux et protège le marché européen.

Des formalités douanières

Toutes les importations sont soumises à des formalités douanières, notamment les déclarations sommaires d’entrée et de sortie. Elles doivent également être conformes aux règles de la zone importatrice.

Les entreprises commerçant avec le RU doivent s’identifier auprès des douanes.

Contrôles sanitaires et phytosanitaires (SPS)

Les règles sanitaires et phytosanitaires européennes sont de rigueur pour toute entrée sur le territoire de l’UE. Elles sont nécessaires pour la protection de la santé humaine, animale et végétale.

Elles interdisent par exemple l’utilisation des hormones ou des OGM. Le dispositif, actuellement transitoire, sera stabilisé au 1er juillet 2021.

Les postes de contrôle frontaliers contrôlent alors ces éléments.

Des standards européens protégés

Dans un objectif de concurrence équitable, l’UE et le RU se sont engagés à maintenir des normes élevées dans des domaines tels que :

  • la protection de l’environnement,
  • la lutte contre le changement climatique,
  • les droits sociaux,
  • les droits du travail,
  • la transparence fiscale,
  • les aides d’Etat.

Ainsi, le RU a accepté de ne pas réviser à la baisse les législations et standards sociaux, environnementaux et climatiques européens en place au 31 décembre 2020 et de s’adapter à leur évolution. Si ces normes ne sont pas respectées, les deux parties peuvent prendre des mesures de rétorsion comme le rétablissement des droits de douane.

Un accord d’équivalence sur l’agriculture biologique est acté.

Pêche : une période de transition jusqu’en 2026

Du côté de la pêche, les professionnels de l’UE devront réduire de 25 % leur capture pendant une période de transition qui s’achèvera à l’été 2026. Jusqu’à cette date, les pêcheurs de l’UE jouiront d’un accès garanti aux zones situées dans les 6 à 12 miles marins au large des côtes britanniques (eaux territoriales). À partir de 2026, l’accord prévoit des négociations annuelles. C’est un enjeu en France, où 30 % de la pêche vient des eaux britanniques.

Transports

L’accord prévoit une connectivité aérienne, routière, ferroviaire et maritime qui s’opérera dans la continuité et la durabilité. Même s’il est vrai que l’accès au marché ne sera pas aussi favorable que dans les conditions du marché unique.

Il comprend des dispositions visant à garantir l’égalité de concurrence entre les opérateurs de l’UE et du RU, de manière à ce que les droits des passagers, les droits des travailleurs et la sécurité du transport ne soient pas compromis.

Deux zones distinctes

Le RU pourra faire évoluer les règles de commercialisation des produits sur son marché, par exemple en matière de normes d’étiquetage, de publicité, etc. Ainsi, les exportateurs vers le RU doivent rester en veille sur ces évolutions potentielles.

Un accord perdant-perdant, et gagnant-gagnant

En rétablissant les frontières, l’accord établit des frictions dans les échanges commerciaux. Les procédures sont chronophages et coûteuses.

D’après l’Association des transporteurs routiers (RHA), les exportations depuis les ports britanniques vers l’UE ont chuté de 68 % en janvier par rapport à la même période l’année précédente, sous l’effet conjugué du Brexit et de la pandémie de coronavirus.

Si une entreprise avait pour habitude de grouper ses expéditions pour le RU et l’Irlande, désormais, il y aura des envois vers l’Angleterre en direct, avec des surcoûts douaniers, administratifs et sanitaires, et du transport direct vers l’Irlande. Le transport sera plus coûteux car les tonnages seront moins élevés.

Toutefois, l’accord minimise l’impact d’un no-deal, et il va au-delà de l’enjeu des tarifs douaniers et des quotas.

L’Hexagone est la principale voie d’accès à l’Europe pour le RU.

Près de 30 millions de voyageurs passent la frontière francobritannique chaque année, avec 5 millions de poids-lourds et autant de véhicules légers, selon les douanes.

En 2019, 1,6 million de camions ont traversé le tunnel sous la Manche. De plus,1,8 million ont embarqué sur un ferry au départ de Calais. Un train empreinte le tunnel toutes les 3 minutes. Tandis que l’on dénombre en moyenne 50 rotations de ferries par jour à Calais.

Une réserve d’ajustement au Brexit pour les pays de l’UE

L’UE a créé une réserve d’ajustement au Brexit de 5 milliards d’euros sur une période de 30 mois (dont 420 millions € pour la France).

Celle-ci est constituée pour faire face aux conséquences économiques et sociales du Brexit. Il peut s’agir notamment d’aider les secteurs économiques, entreprises et communautés locales impactés, de soutenir l’emploi.

Et après le Brexit ?

Le RU, un des principaux partenaires commerciaux de la France

Avec 33,6 Md€ d’exportations et 21,1 Md€ d’importations en 2019, le RU est le 6e client de la France et son 7e fournisseur. Le RU était le premier excédent commercial de la France (12,5 Md€). Si les flux bilatéraux ont été affectés par la crise sanitaire et ses conséquences économiques, les liens commerciaux avec le RU restent puissants et la France a enregistré un excédent commercial de 5,6 Md€ sur les huit premiers mois de l’année 2020.

Impact du Brexit sur l’économie française

Selon la société d’assurance crédit Euler Hermes, la France sera le troisième pays européen le plus affecté par le Brexit avec des pertes à l’export d’1,9 Md€ par an.

Concrètement, les secteurs les plus touchés seront ceux des transports et des équipements, la chimie, les machines et équipements électriques, suivis par le
secteur des métaux précieux et bijoux.

Le gouvernement français évalue le taux d’incidence du Brexit sur l’économie française à 0,1 point de la richesse nationale en 2021.

Parité €/£

L’évolution de la parité des monnaies aura un impact sur la compétitivité des produits. Depuis le début de l’année, la livre se renforce légèrement face à l’euro. Cela est favorable à la compétitivité des produits européens. La parité est à suivre dans le temps.

Le RU à la recherche de nouveaux accords de libre échange ?

Pour réduire sa dépendance à l’UE, le RU cherchera à conclure des accords de libre échange avec d’autres pays.

Pour le lait et les produits laitiers par exemple, le RU parviendra-t-il à signer des accords avec de grands pays laitiers compétitifs comme les USA ou la Nouvelle-Zélande ? La qualité, la diversité, la compétitivité des produits laitiers irlandais, néerlandais, allemands, français seront des atouts pour préserver les
flux européens à l’export.

Quelle stratégie pour l’agriculture britannique ?

Le RU cherchera peut-être à augmenter sa production pour réduire son déficit. La stratégie des industriels sera déterminante, de même que la future politique agricole britannique. Le gouvernement britannique souhaite mettre en place des aides visant la rémunération de services environnementaux ou d’amélioration du bien-être animal. Cela pourrait avoir des conséquences sur le niveau de production du pays, et renforcer son déficit.

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