Impacts système réforme PAC 2023

Temps de lecture : 10 minutes

Les impacts de la réforme de la PAC 2023 par système

La réforme de la PAC 2023 aura moins d’impact que la précédente. Il ressort de plusieurs simulations réalisées par système de production peu de bouleversements à compter de 2023, avec des impacts plus ou moins marqués selon les territoires et les systèmes. L’enjeu principal sera de percevoir l’éco-régime. Chaque exploitation est un cas particulier à étudier pour vérifier son éligibilité à l’éco-régime, et si besoin s’adapter. Il est important d’anticiper l’assolement 2023. Des leviers et pistes d’optimisation sont possibles.

Les grandes lignes de la PAC 2023

Dans la continuité … sans grande nouveauté !

Le budget et l’architecture des deux piliers sont conservés. Les deux principales nouveautés sont la mise en place de l’éco-régime et de l’aide à l’UGB (unité gros bétail), en remplacement des aides bovines laitières et aides bovines allaitantes. Les conditions du paiement vert sont intégrées à la conditionnalité. Cette dernière se trouve donc renforcée.

Conservation de l'architecture des aides directs
Conservation de l’architecture des aides directs

Les éco-régimes : trois voies d’accès – deux niveaux de paiement

L’éco-régime est la principale nouveauté de cette réforme. Il remplace le paiement vert avec la mise en place de pratiques favorables à l’environnement sur l’exploitation. C’est une aide annuelle accessible via trois voies facultatives avec deux niveaux de paiement (60 € et 82 €).

Les voies d'accès aux éco-régimes et les 2 niveaux de paiement
Les voies d’accès aux éco-régimes et les 2 niveaux de paiement

Les trois voies d’accès

La voie certification

Cette première voie est accessible pour les exploitations certifiées Haute Valeur Environnementale (HVE), en démarche de certification, ou en agriculture biologique (100 %), y compris en conversion.

La voie infrastructures agro-écologique IAE

Cette deuxième voie est possible selon la présence d’éléments non productifs ou de paysage sur la surface agricole (minimum 7 % pour avoir le niveau standard ou 10 % pour le niveau supérieur).

La voie des pratiques agricoles

Cette dernière voie est conditionnée au respect de trois blocs (conditions cumulatives) :

  • Avoir une diversité des cultures, définie selon une grille de points.
  • Ne pas retourner les prairies permanentes.
  • Enherber l’inter-rang pour les cultures pérennes.

Le niveau de paiement

Selon les seuils atteints, le niveau de paiement standard (60 €/ha) ou supérieur (82 €/ha) s’appliquera.

L’aide bovine à l’UGB remplace les aides bovines allaitantes (ABA) et laitières (ABL). C’est une aide à deux niveaux de prix : 60 € ou 110 € par UGB en 2023 selon le sexe, la race lait, viande ou mixte. Les animaux éligibles à cette aide sont les animaux de plus de 16 mois présents six mois sur l’exploitation (mâles ou femelles). C’est un calcul complexe avec différents plafonds selon le type d’animaux. Un plafond de l’aide s’applique à hauteur de 120 UGB et dans la limite de 1.4 fois la surface fourragère, avec la transparence GAEC.

Ce qu’il faut retenir : ce n’est plus une aide à la vache mais à l’UGB. Les génisses et les mâles deviennent éligibles.

L’impact économique des aides du 1er pilier sur six systèmes de production

Les systèmes « céréales et oléo-protéagineux »

Caractéristiques du système :

SAU : 147 ha

Surfaces de vente : 132 ha dont 90 ha de céréales, 23 ha de colza, 2 ha de pois, 5 ha de lin et 3 ha de betteraves. Céréales : 62 ha de blé, 8 ha d’orge d’hiver, 11 ha d’orge de printemps et 4 ha de maïs grain

Produit total (2019-2020) : 250 000 € dont aides PAC 2020 = 34 500 € – aides/ha = 236 €

Effectifs animaux éligibles aux aides : 9 UGB

L’impact de la réforme

L’impact de la réforme sur les exploitations sera moins important que celui de la précédente réforme.

En moyenne, et sous réserve de respecter les conditions de l’éco-régime, les systèmes céréales et oléo-protéagineux normands devraient voir leur niveau d’aide augmenter d’environ 3 %. Le paiement de base profite de la revalorisation de son budget. Il est donc peu affecté par la convergence. Le montant de l’éco-régime est proche de celui du paiement vert.

Sans éco-régime, les aides PAC baisseraient en moyenne de 30 % pour le quart des exploitations.

Les systèmes « grandes cultures »

Caractéristiques du système :

SAU : 161 ha

Surfaces de vente : 142 ha dont 74 ha de céréales, 14 ha de colza, 22 ha de lin, 6 ha de pommes de terre et 14 ha de betteraves

Céréales : 64 ha de blé, 4 ha d’orge de printemps et 4 ha d’orge d’hiver

Produit total (2019-2020) : 440 000 € dont aides PAC 2020 = 39 400 € – aides/ha = 242 €

Effectifs animaux éligibles aux aides : 25 UGB

L’impact de la réforme

Les tendances dans ces systèmes sont similaires à celles des systèmes « céréales et oléo-protéagineux COP ». Les trois quarts des systèmes « céréaliers » ou « grandes cultures » accèderaient aux éco-régimes sans adaptation.

Les systèmes « laitiers spécialisés »

Caractéristiques du système :

SAU : 112 ha

Cultures de vente : 24 ha (blé, orge)

SFP : 87 ha dont 1/3 de maïs

40 % des exploitations en GAEC

Produit total (2019-2020) : 350 000 € dont aides PAC 2020 = 31 000 € – aides/ha = 275 € – aides/1 000 L = 53 €

Quantité de lait vendu : 586 572 litres avec 89 vaches laitières

Effectifs animaux éligibles aux aides : 78 UGB

L’impact de la réforme

En moyenne, et sous réserve de respecter les conditions de l’éco-régime, les systèmes laitiers devraient voir leur niveau d’aide augmenter de 9 %. Le paiement de base profite de la revalorisation de son budget. Ce paiement de base est donc peu affecté par la convergence. Le montant de l’éco-régime est proche de celui du paiement vert. Le passage d’aides à la vache laitière à des aides à l’UGB est favorable, car les montants sont plus importants et les UGB génisses de plus de 16 mois peuvent être primées (dans la limite des plafonds).

Sans éco-régime, les aides PAC baisseraient en moyenne de 21 %. 85 % des laitiers spécialisés accéderaient aux éco-régimes.

Les systèmes « laitiers taurillons »

Caractéristiques du système :

SAU : 160 ha

Cultures de vente : 50 ha (blé, orge, colza)

SFP : 107 ha dont 50 ha en maïs ensilage

60 % des exploitations en GAEC

Produit total (2019-2020) : 550 000 € dont aides PAC 2020 = 43 000 € – aides/ha = 237 €

Référence laitière : 620 000 litres avec 83 vaches et 115 jeunes bovins vendus

Effectifs animaux éligibles aux aides : 204 UGB

L’impacts de la réforme

La mise en place de l’aide à l’UGB est favorable aux éleveurs, notamment avec de l’engraissement (ici des taurillons). Les aides animales progresseraient de 3 000 € (uniquement les ABL) à 12 200 € en 2023 et 11 400 € en 2027. Ces exploitations profitent aussi de la revalorisation des droits au paiement de base. Les aides augmenteraient de 24 %, soit + 10 500 € pour atteindre en moyenne 54 000 € par exploitation.

Toutefois, notons que sans transparence GAEC, la progression des aides PAC serait plus modérée : + 6 200 €. Sans éco-régime (par exemple les systèmes maïs + prairies temporaires représentant moins de 30 % des terres arables), les aides PAC baisseraient de 2 500 € (– 6 %). L’enjeu d’atteindre l’éco-régime dans ce système est estimé à 13 000 €.

Les systèmes « laitiers cultures »

Caractéristiques du système :

SAU : 168 ha avec 65 ha de céréales d’hiver (blé, orge), 33 ha de céréales de printemps (escourgeon, maïs ensilage), 12 ha de colza, 7 ha de lin et 3 ha de betteraves

40 % des exploitations en GAEC

Produit total (2019-2020) : 460 000 € dont aides PAC 2020 = 43 300 €

Production laitière : 540 000 litres avec 73 vaches laitière

Effectifs animaux éligibles aux aides : 60 UGB

L’impact de la réforme

Ces systèmes auraient leur niveau d’aide en légère hausse avec la mise en place de l’aide à l’UGB, soit + 2 200 €. La capacité à obtenir l’éco-régime est alors importante dans ces systèmes : l’enjeu est de 11 500 €. Si l’éco-régime n’est pas atteint (ce qui est peu probable), les aides baisseraient de 27 %.

Les systèmes « viande naisseurs engraisseurs »

En moyenne, et sous réserve de respecter les conditions de l’éco-régime, les systèmes « viande naisseurs engraisseurs » devraient voir leur niveau d’aide augmenter d’à peine 8 %. Comme les autres systèmes, le paiement de base profite de la revalorisation de son budget.

Le passage d’une aide à la vache allaitante à une aide à l’UGB permet de primer les génisses et les mâles de plus de 16 mois, ce qui est bénéfique dans ce système moyen, malgré la baisse du montant de la prime. Il faut noter que le niveau des aides couplées animales serait resté stable sans l’élevage d’une partie des mâles.

Les gagnants – Les perdants

Des systèmes verront leurs aides PAC progresser davantage, notamment les systèmes laitiers taurillons en GAEC qui bénéficieront de la mise en place de l’aide à l’UGB et de la transparence GAEC.

A contrario, d’autres systèmes verront leurs aides baisser s’ils ne respectent pas l’éco-régime a minima de niveau 1 (60 €/ha). La capacité à atteindre l’éco-régime sera déterminante.

Les exploitants bénéficiant de l’éco-régime de niveau 2 devraient voir les aides augmenter de 1 000 € (cultures) à 4 000 € (lait diversifié) en moyenne.

Avec un paiement de niveau 1, les aides se stabiliseraient plutôt. Sans éco-régime les aides vont diminuer de 4 000 € (viande) à 11 000€ (cultures). Les enjeux de l’éco-régime varient de 7 500 € pour un système « viande » à 12 000 € pour un système « cultures ».

10 à 30 % selon les systèmes sont concernés par des voix d’adaptation pour optimiser l’éco-régime.

Étant donné l’enjeu que représente l’éco-régime, il est nécessaire que chaque exploitation mesure dès maintenant sa capacité à le percevoir et étudie si besoin les leviers disponibles. Un changement à la marge de l’assolement peut remettre en cause la perception de 5 à 10 000 €.

Niveau des aides PAC 2023 selon l'écorégime par système de production
Niveau des aides PAC 2023 selon l’écorégime par système de production

Les leviers

Des pistes d’adaptation pour atteindre à minima l’éco-régime de niveau 1

  • Baisser les surfaces de céréales d’hiver et de colza, au profit de cultures de printemps et plantes fixatrices d’azote, prairies temporaires, luzerne, etc., ou de la jachère (qui peut aussi permettre de respecter la conditionnalité, qui se renforce avec la BCAE8 imposant un taux de surfaces non productives) afin de diversifier l’assolement et atteindre a minima les quatre voire cinq points de la grille de la diversité d’assolement.
  • Rechercher de nouveaux débouchés pour valoriser ces productions.

Exemple : une exploitation de 150 ha avec un assolement simplifié (type 65 ha de blé, 37 ha d’orge, 41 ha de colza et 6 ha de jachère) n’aura que 2 points à la lecture de la grille. Implanter 2 ha de jachère supplémentaire à la place de 2 ha de blé permet d’accéder au niveau 1 (+ 2 points prairies temporaires et jachères) sous réserve de respect des deux autres blocs de la voie pratique. La perte de 2 ha de marge blé (2 x 800 €/ha = 1 600 €) est compensée donc par l’éco-régime de niveau 1 (60 € x 150 = 9 000 €).

Si, en plus, 10 ha de blé sont implantés en orge de printemps et 10 ha de colza en pois, le niveau 2 est atteint (avec + 2 points en cultures fixatrices d’azote + 1 point en céréales de printemps). La perte sur les écarts de marges en substitution des cultures est alors de 5 000 €, sans comptabiliser les aides couplées sur les protéagineux (écart marge blé/orge 200 € x 10 ha ; écart colza/pois = 300 € x 10 ha). Cette perte de marge est donc largement compensée par l’éco-régime de niveau 2 (150 ha x 82 € soit 12 300 €).

Des pistes pour optimiser les aides

  • Pour les aides à l’UGB :
    • Engraisser les mâles laitiers (si le plafond n’est pas atteint).
    • Possibilité d’avoir plus de primes en allongeant le cycle. Par exemple, le passage de broutardes à génisses 30 mois permet d’avoir 66 € la 1re année (0,6 UGB x 110 €) et 110 € la 2e année (1 UGB x 110 € = 110 €), soit 176 € par génisse engraissée. Le montant des aides à l’UGB évolue à la baisse entre 2023 et 2027.
    • Même montant de primes en diminuant les vêlages et en allongeant le cycle.
    • Au-delà du plafond de 120 UGB : s’assurer de la marge brute dégagée par les UGB > 120 (pour les sociétés, étudier les avantages et les inconvénients du statut du GAEC).
  • Développer des productions disposant d’aides couplées tels que des cultures protéiques graine et fourrage (sécurisera aussi l’accès à l’éco-régime).
  • Points de vigilance : respecter la super conditionnalité notamment la BCAE8 avec les surfaces et éléments non productifs (avoir minimum 4 % d’éléments ou surfaces non productives sur les terres arables ou 7 % avec des cultures fixatrices d’azotes et dérobés dont 3 % en non productifs).

Ces pistes et leviers sont à étudier en prenant en compte tous les autres paramètres de l’entreprise : la disponibilité en main-d’œuvre, le système fourrager, la disponibilité des places dans les bâtiments, marchés, la rentabilité économique (engraisser les mâles laitiers, pourquoi pas, mais quelle rentabilité ?) etc., et les projets / les objectifs des chefs d’entreprise. L’enjeu de la PAC n’est qu’un des facteurs à prendre en compte dans la vie d’entreprise. Actuellement, l’envolée des prix des matières premières a autant d’enjeux que les effets de la PAC à venir. C’est une réflexion globale à mener pour adapter, si besoin, son système.

Zoom sur la diversité des assolements

La voie pratique sera certainement la voie la plus utilisée par les exploitants.

85 % des exploitations du périmètre de Cerfrance Normandie Maine pourraient prétendre à l’éco-régime sans modification de leur assolement, en atteignant au moins 4 points au titre de la diversité des cultures.

Pour chaque exploitation, à partir de son assolement saisi dans les dossiers de gestion, une estimation du nombre de points a été réalisée pour vérifier si le critère diversité était respecté ou non selon la grille de points définie dans le plan stratégique national français (PSN). Nos estimations sont certainement sous estimées car elles ne distinguent pas les prairies temporaires des prairies permanentes.

Sans aucune adaptation, 17 % des exploitations n’auraient aucun paiement à l’éco-régime (systèmes cultures de type blé, orge, colza uniquement). 21 % auraient le niveau minimum de 4 points, soit le niveau standard à 60 €. 63 % auraient plus de 5 points pour atteindre le niveau supérieur (82 €).

Tous systèmes confondus, l’estimation de l’éco-régime est de 7 300 € (sur notre échantillon), avec 20 % des exploitations à 0 €, 20 % d’exploitations à un éco-régime moyen de 7 800 € et 60 % avec un éco-régime moyen de 9 000 €.

Des zones plus ou moins impactées

D’un point vu géographique, certaines zones sont plus fortement impactées. Notamment, les zones céréalières avec des assolement type blé, orge, colza dans l’Eure et le Perche Ornais, par exemple.

La part d’exploitations avec un éco-régime de niveau 2 est inférieure à 50 % dans ces zones. Pour la zone de la Manche, cela s’explique aussi par des exploitations avec des assolements prairies et maïs ensilage.

Toutefois, vigilance, ces cartes donnent des informations tendancielles. Elles ont été construites à partir des éléments saisis dans les dossiers de gestion des exploitations, pas toujours précis. Par exemple, il y a une distinction des prairies permanentes et prairies temporaires. Certaines zones peuvent être sous ou surestimées selon le pourcentage des prairies temporaires et jachère dans les assolements.

Source et méthode

Source : Plan Stratégique National du 13/09/2021

Outil de simulation utilisé : simulateur PAC développé par Farmeo et Cerfrance Terre d’Allier avec le Conseil National Cerfrance, déployé sur 45 Cerfrance.

Les principales hypothèses retenues sont :

  • la revalorisation des DPB de 11 % et convergence du paiement base à 85 %,
  • le paiement redistributif : 10 % sur 52 ha avec transparence GAEC en moyenne,
  • les aides bovines réparties à l’UGB selon les races laitières ou viande avec le plafond de 120 UGB et 1,4 x la surface fourragère.
  • pour les éco-régimes, l’hypothèse émise est qu’en moyenne le système respecte l’éco-régime de niveau supérieur, avec le respect des conditions et de l’aide indiqué dans le PSN. C’est donc un maximum. Pour chaque système, les enjeux de l’atteinte du niveau supérieur, niveau standard et sans éco régime ont été mesurés.

Les aides unitaires sont celles indiquées dans le PSN. Les montants des aides sont des « montants-plafonds » (aides couplées et éco-régime). Un coefficient stabilisateur pourra donc être appliqué selon le nombre de demandes. Les aides effectives seront alors potentiellement inférieures à ces niveaux, accentuant les effets à la baisse et limitant les effets à la hausse.

Retrouvez également un résumé de cette présentation de la réforme de la PAC 2023 en vidéo sur notre site internet.

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